“On ne peut en saisir la dimension et l'importance, et la juger sainement que si on la replace dans le contexte, où elle s'est déroulée, international et algérien". Cet écrit de l'ancien président du GPRA, Benyoucef Benkhedda, répond-il à des avis qui doutent encore de l'opportunité de la grève des huit jours décidée par le FLN, il y a 56 ans ? L'évènement a été revisité, hier, au centre de presse du quotidien El Moudjahid par l'association Machaâl Echahid où le Dr Amer El-Khilla, historien chercheur, a, à travers une esquisse, fait ressortir tous les ingrédients d'un dossier que d'aucuns considèrent comme “une page à tourner" de l'histoire de la résistance durant la guerre de Libération nationale. Pour le conférencier, la grève des huit jours fut, contrairement à ce que l'on peut dire, un événement historique de premier plan dans cette guerre. Elle fut décidée par le Comité de coordination et d'exécution (CCE) pour répondre à un contexte international fait d'un certain nombre de faits survenus en 1956 : l'agression des trois alliés (France, Grande-Bretagne, Israël) contre l'Egypte, pays qui soutenait largement la Révolution algérienne, le rapt par les forces françaises des cinq responsables FLN en partance par avion de Rabat à Tunis, le renforcement par l'administration coloniale de ses effectifs militaires, enlèvements, lavage de cerveau, etc. L'indignation du groupe arabo-asiatique sur les exactions françaises est alors perçue par le FLN comme un signal fort, ce qui renforce l'idée d'internationaliser l'affaire algérienne de manière à amener les autres nations à s'y immiscer et surtout à forcer la France à faire droit aux revendications du FLN, d'autant que l'AG de l'ONU qui était prévue en décembre 1956 offrait une opportunité pour réitérer les exigences de la Révolution. Il fallait, selon le conférencier, arriver à convaincre l'opinion mondiale qu'il y avait, en effet, une réelle guerre de libération et contrecarrer la propagande véhiculant l'idée que l'Algérie est partie intégrante de la France. Sur un autre plan, il s'agissait de faire admettre la représentativité du FLN comme interlocuteur exclusif. C'est ainsi que le déclenchement d'une grève à grande échelle semblait avoir l'unanimité des responsables du CCE qui prirent la décision d'organiser cette grève, et pas n'importe où. Dans la capitale tout en mobilisant le peuple derrière le FLN. Malheureusement, le gouvernement français en est informé, et décision est prise de sitôt pour envoyer sur le terrain le 10 régiment des parachutistes conduit par le général Massu. Il fallait briser la grève. Au premier jour, soit le 28 janvier 1957, alors que tous les Algériens suivent le mot d'ordre, ces derniers à tous les niveaux d'activité sont transportés de force sur leurs lieux de travail (chantiers, port, moyens de transport), alors que les magasins sont ouverts par la force. S'en suivirent les arrestations massives, les tortures généralisées et assignations à résidence. Mais le coup le plus dur pour la Révolution c'était notamment la destruction quasi-totale de l'organisation FLN d'Alger par le grand mouvement d'arrestations de responsables dont le héros Larbi Ben M'hidi le 23 février 1957 et la découverte par Bigeard de la cache où se trouvaient Ali la Pointe, Hassiba Ben Bouali, petit Omar et Bouhamidi, et dont la maison de la rue des Abderrames fut plastiquée en octobre de la même année. L'activité des Fidayine à Alger fut presque anéantie et ne reprendra qu'avec les manifestations du 11 Décembre 1960. Cependant, s'il est vrai que cette grève s'est avérée un échec, sur le plan international l'évènement est une victoire pour avoir permis le triomphe de l'idée d'indépendance relayée en France par l'émigration qui épouse les revendications du FLN, la représentativité du FLN et “reconnaissance" par l'ONU qui décide en décembre 1957 l'inscription d'une résolution de compromis votée à l'unanimité sauf par la France pour une résolution pacifique et démocratique en conformité avec la charte des Nations unies. Peu de temps après, les grandes nations notamment les USA ont fini par marquer les sessions de l'ONU par un vote d'abstention avant de reconnaître la légitimité de la cause algérienne. A F