Ces artistes en herbe réclament justice au directeur de l'école et à la ministre de la Culture qui a “manqué à ses promesses". Ces étudiants revendiquent depuis deux ans un meilleur enseignement, un diplôme valable aux yeux des recruteurs et du matériel “neuf" pour assimiler leurs cours. “Cette semaine, nous allons entamer une grève de la faim. Nous irons jusqu'au bout pour regagner nos droits", nous a déclaré Ali Mizi, porte-parole du bureau des étudiants de l'Institut supérieur des métiers des arts, de l'audiovisuel et de la scène (Ismas). Joint par nos soins mercredi dernier, cet artiste est complètement déterminé, avec ses camarades, à rester en grève, jusqu'à satisfaction de leurs revendications. Ce collectif de gréviste représente 95% des étudiants de l'institut. “Tout le monde a pris part à ce combat". D'ailleurs, mercredi dernier, ils s'étaient rassemblés à la maison de la presse du 1er Mai dans le but de “lancer un appel à la famille artistique et médiatique qui a le pouvoir de nous aider !", a-t-il souligné. Pour rappel, ces sit-in et grève de la faim sont une continuité aux événements des 21 et 22 janvier dernier. Après avoir accompli une première protestation, l'affaire a pris de grosses proportions à l'Ismas. Les étudiants “accusent" leur directeur, Abdelaziz Benmahdjoub, d'avoir “coupé l'électricité, l'eau et interdit l'accès au réfectoire et à l'internat, tant que les étudiants persisteront dans la grève", a-t-il précisé. Toujours selon Ali Mizi, le directeur aurait “traduit 86 élèves en conseil discipline. On a refusé d'y assister et cela a conduit au renvoi définitif de 15 personnes". Ce conseil de discipline entre dans le cadre “d'absence aux cours", alors que le “règlement de l'école ne stipule en aucun cas cette application". Et de renchérir : “Il a poursuivi en justice le bureau des étudiants de l'Ismas (pour grève illégale)". Lorsque nous avons contacté M. Benmahdjoub pour avoir plus d'informations, ce dernier a estimé sur un ton sec qu'il “faut s'adresser au ministère de la Culture et qu'il ne pouvait rien dire". “Le ministère a failli à ses promesses" Les revendications de ces étudiants s'articulent autour de quatre axes. D'abord, le changement du DEA en un diplôme. “Avec ce DEA, nous ne pouvons pas accéder à la post-graduation et il n'est pas classé dans la fonction publique. Il n'a aucune valeur", a indiqué Ali Mizi. Et d'ajouter : “Pour travailler dans le secteur culturel, cela relève de l'impossible, car ce diplôme n'existe pas !" Le deuxième axe touche la formation. “Les programmes ne sont pas tous appliqués et il y a un manque de professeurs. Il faudrait aussi une remise à niveau des professeurs, la plupart ont été diplômés pendant les années 1970", a-t-il constaté. Cet institut, qui veille à créer les “futurs" talents et artistes algériens, connaît un déficit dans les moyens techniques. “Il n'y a pas de projecteurs dans la salle de théâtre, et les caméras ne fonctionnent pas. Tout simplement, il n'y a pas de matériel", s'est exclamé l'étudiant. Cette insuffisance entre dans le volet du troisième axe qui compte entres autres “l'amélioration des conditions de l'internat". Le meilleur moyen pour apprendre est d'être sur le terrain, car cela permet d'assimiler les cours dix fois plus vite que la théorie, mais cela n'est nullement le cas à l'Ismas. “Nous voulons participer aux activités culturelles organisées par le ministère de la Culture ; créer un échange en produisant des spectacles à l'école", a insisté le gréviste sur ce dernier axe qui concerne la vie culturelle et estudiantine de l'institut. Flash-back L'histoire de cette revendication remonte à 2011. Le ministère de la Culture avait initié “quatre ateliers sur ces quatre axes. Après lecture des rapports, Khalida Toumi est venue à l'école et a promis de changer les choses", a fait savoir notre interlocuteur. Et d'expliquer : “Mais depuis deux ans, rien n'a changé. La ministre n'a pas tenu ses promesses." Concernant le diplôme, elle devait prendre attache avec le ministère de l'Enseignement supérieur et “pour le moment, rien n'a été fait". Etudiant dans des conditions alarmantes, les élèves ont réagi en janvier dernier. “Nous avons repris les cours pendant huit jours. Après l'obtention d'un préavis favorable pour la grève, nous avons entrepris une grève illimitée." Acharnés à voir leur situation évoluer au sein de cet établissement, les étudiants écrivent depuis deux ans aux deux ministères sans relâche, même “s'ils font la sourde oreille, nous n'arrêteront pas, notre situation est atroce", a-t-il conclu. Ces jeunes, artistes de demain, continuent à monter des spectacles et à “s'auto-former", en attendant des lendemains meilleurs ! H M