Décidément, “un autre monde" n'est pas possible pour les Algériens. C'est ce que semblent vouloir dire les autorités algériennes. En effet, près de 200 militants du mouvement social algérien, entre syndicalistes, militants associatifs, membres d'organisation des droits de l'Homme, jeunes altermondialistes, ont été empêchés de se rendre en Tunisie pour prendre part au Forum social mondial (FSM) qui se tiendra à Tunis du 26 au 30 mars. C'est à la frontière algéro-tunisienne que les tracasseries ont commencé. Les bus transportant ces militants en partance pour Tunis ont été bloqués à la PAF algérienne. Selon des militants, plus de 100 personnes ont été retenues au poste frontalier d'Oum Tboul, dans la wilaya d'El-Tarf. C'est au poste de police, côté algérien, que ces militants ont été bloqués, une première fois. Les pourparlers ont duré plus de 5 heures. Mais en vain. Selon des syndicalistes, “le commissaire a été catégorique et les instructions venues d'en haut très fermes". Les bus n'ont pas été autorisés à “quitter le territoire" algérien. Heureusement pour ces activistes, les ordres sont arrivés un peu en retard, puisqu'ils ont pu faire cacheter leur passeport. C'est ainsi que ces militants, dont plusieurs femmes, ont été abandonnés dans un no man's land, à des kilomètres de la première ville tunisienne. Par ailleurs, deux bus affrétés par le Snapap ont, pour leur part, été refoulés au poste frontalier de Layoun, dans la wilaya de Tébessa. Arrivés à ce poste à 4h du matin, les militants ont dû remettre leur passeport et attendre jusqu'à 9h, pour se voir refuser le cachet. La délégation, composée d'environ une centaine de militants du Snapap (aile Malaoui) et de la Laddh, a tout simplement été invitée à rebrousser chemin. Là encore, “il y aurait une instruction venue de très haut interdisant le passage des participants au FSM", lit-on dans un communiqué posté sur le site de la Laddh. “Le pouvoir a peur de l'exportation ou de l'internationalisation de la mobilisation citoyenne autour du mouvement des chômeurs", a déclaré à la presse Moumen Khelil, militant de la Laddh. “Cet acte démontre, encore une fois, que le pouvoir algérien éprouve une peur panique devant tout acte pouvant entraîner une “contagion démocratique" à la suite des derniers développements dans la région", a déclaré Youcef Aouchiche, le secrétaire national aux mouvements sociaux du FFS. Pour Mahmoud Rechidi du PST, “ce refoulement des Algériens est une remise en cause du droit à la libre circulation. Ceci est lié à une escalade répressive. C'est ce que nous avons vu avec les manifestants et les arrestations de Barbacha à Béjaïa, les chômeurs, les grévistes... Cela contredit bien évidemment le discours d'ouverture du régime". Pour Maâzouz Athmane du RCD, “ceci signe la constance du pouvoir dans sa volonté de fermeture et de répression de tout mouvement et organisation structurés". “Le pouvoir, par de tels actes, ne fera qu'aggraver son isolement sur la scène internationale et participera à l'humiliation des Algériens aux yeux de l'opinion internationale", conclut le secrétaire national à la communication du RCD. Le régime algérien n'a pas trouvé meilleure occasion d'humilier les animateurs du mouvement que ce FSM Tunis 2013, pourtant placé sous le signe de... la dignité. M F