Le monde s'achemine inexorablement vers un espace où seuls résonnent les mécanismes de l'économie de marché ou même de l'économie tout court. Cette tendance achève peu à peu les valeurs sécuritaires humaines. Elles disparaissent une à une dans un silence qu'accompagne souvent la complicité la plus machinale. Bien que le gain soit légitime, car considéré comme principal objectif de tout investissement, la course effrénée au développement économique à tout prix devient absolue, effrayante et inhumaine. Les objectifs à atteindre finissent par phagocyter et dépasser toutes les règles et données sociales. Ils débordent sur les rives de la vie comme font les vagues rageuses qui viennent des fonds des océans désagréger peu à peu les contreforts de la terre, la repoussant ainsi toujours plus loin en attendant de la réduire. L'éthique économique tend à ne plus tenir compte de ces règles et données sociales d'autant plus qu'elle concerne tous les rôles et tous les acteurs : producteurs/promoteurs et consommateurs compris. Chez les premiers, le rapport à l'argent et au gain se transforme alors en une doctrine idéologique insensible mais surtout impitoyable. Chez nous autres consommateurs, la massive consommation nous fait égarer dans l'assouvissement de nos plaisirs, de nos goûts insatiables et voraces mais aussi de nos besoins combien utiles. Naturellement, nous sommes donc tous relativement responsables de ce tourbillon de l'économisme et du consommatif. Ce sont jusque-là les structures sociales traditionnelles (valeurs à ne pas connoter négativement) qui ont retardé un temps soit peu les mutations sociales imposées et incontrôlées. Elles ont jusque-là joué le rôle de régulateur, mais là aussi ce n'est qu'une question de temps, et pour combien encore. Reste à savoir si les mouvements de la société civile, ceux-là mêmes qui ne cessent d'émerger dans différents domaines d'intervention pour alerter l'opinion publique sur les risques imminents que nous encourons, seront réellement capables d'imposer un réajustement. Mais la réplique que donnent les Etats et la conception hégémonique qu'ont les uns et les autres du monde à travers leurs différentes organisations commerciales, monétaires et géopolitiques, qui fonctionnent comme des remparts pour empêcher toute influence de cette société civile, n'augure d'aucun espoir pour un réajustement équitable entre la logique économique et le bon sens de la vie. A. A. [email protected] Nom Adresse email