Après l'ultimatum de l'opposition sommant le président Mohamed Morsi de quitter le pouvoir, qui expire aujourd'hui, l'armée égyptienne s'est rangée du côté du peuple en menaçant d'intervenir sous quarante-huit heures, si les revendications populaires ne sont pas satisfaites. L'armée égyptienne a créé l'événement hier en avertissant qu'elle interviendrait si les revendications du peuple n'étaient pas satisfaites dans les prochaines 48 heures. Ainsi, les manifestations massives appelant au départ du président Mohamed Morsi ont fait réagir le commandement militaire égyptien qui "a réitéré sa demande pour que les revendications du peuple soient satisfaites" et "donné (à toutes les parties) 48 heures, comme dernière chance de prendre leurs responsabilités face aux circonstances historiques auxquelles le pays fait face". "Si les revendications du peuple ne sont pas satisfaites durant cette période, les forces armées annonceront une feuille de route et des mesures pour superviser leur mise en œuvre", selon cette déclaration. Cette annonce a été accueillie par une explosion de joie des manifestants anti-Morsi rassemblés sur la place Tahrir au Caire, qui estiment que l'armée pousse ainsi le président vers la sortie. "Morsi n'est plus notre président, Sissi avec nous", ont scandé les manifestants, en référence au général Abdel Fattah al-Sissi, chef de l'armée et ministre de la Défense, dont la photo est apparue à l'écran pendant la lecture de la déclaration. L'armée semble emboîter le pas à l'opposition égyptienne qui avait donné jusqu'à aujourd'hui au président Morsi pour quitter le pouvoir. Ça ne sera plus comme avant pour le président islamiste d'Egypte, Mohamed Morsi, avec les marées humaines réclamant son départ, un an après son investiture. Des cortèges d'une ampleur sans précédent depuis la révolte qui fit chuter Hosni Moubarak début 2011, scandant "dégage" et "le peuple veut la chute du régime islamiste". La plus grande manifestation de l'histoire de l'Egypte, voire du monde arabe. On parle de 14 millions de personnes dans les rues du Caire, d'Alexandrie et des villes de vallée du Nil. Grand symbole du rejet de l'islamisme : dans la capitale, le QG de la confrérie islamiste, dont est issu Morsi, a été arrosé de pierres et de cocktails Molotov. Cette méga-mobilisation va-t-elle changer le cours des choses ? Pour la première fois dans le monde arabo-musulman, un raz-de-marée de manifestants prend à partie des islamistes et de plus au pouvoir et installés par la voie des urnes, se soulève contre eux les accusant des divers maux économiques du pays mais également de ne travailler que pour leurs propres privilèges. On est en Egypte, de ce point de vue, à des années lumières de la magie du pouvoir divin attribué de facto aux islamistes. Durant ces six derniers mois, l'Egypte a recensé son plus grand nombre de manifestations, à savoir environ 10 000 qui imputent le "chaos" à la dictature islamiste encore "plus dangereuse que la dictature de Moubarak". Dangereuse, souligne-t-on, à visages découverts, sur la place Tahrir, épicentre de ces grandes agitations révolutionnaires en Egypte, car elle se dit et redit "religieuse", prenant Dieu comme "garant" de toutes les lois qu'elle a tenté d'imposer. La vitrine propre derrière laquelle se cachaient Morsi et ses Frères a été éventée, comme les aides des Etats-Unis et de l'Europe pour que le pouvoir islamiste fasse passer leurs intérêts avant ceux de la nation égyptienne, ajoute-t-on dans les divers milieux de l'opposition. Au sein du gouvernement, de l'administration, de plus en plus de ministres et de responsables, sont issus de la confrérie des Frères, la moitié des gouverneurs, (jusqu'à nommer un ancien terroriste comme gouverneur de Louxor, celui-là même qui avait été le cerveau des attentats de Louxor en 1997), des officiers supérieurs, des hauts gradés de la justice, les médias publics. Pour l'heure, n'a échappé à la vague verte que la justice. En l'espace d'un an, Morsi est parvenu à mettre ses mains dans toutes les sphères de l'Etat. Et il n'y a pas que les laïcs, les libéraux, les nassériens, les nationalistes et les Coptes à faire ce procès de la religion au pouvoir. Pour évaluer le chaos du régime islamiste, il suffit d'observer l'état général du pays : l'Egypte s'est encore appauvrie, moins d'eau, essence au marché noir, coupures d'électricité chaque jour dans la capitale, rues absolument plus sûres... Nombre de ceux qui ne sont pas descendus durant les premiers jours de la révolution de 2011 sont descendus le 30 juin, car il n'est plus supportable aujourd'hui de vivre en Egypte. D. Bouatta/M. Tigrine Nom Adresse email