Ce coup de force contre un président élu démocratiquement pose problème même si Morsi a été chassé par la "légitimité populaire", moins de trois ans après le sort identique subi par Moubarak, le pharaon. Si l'éviction du pouvoir islamiste par l'armée est accueillie, depuis la nuit de mercredi à jeudi, par des cris de joie, feux d'artifice et musique patriotique et par des accolades entre civils et forces de l'ordre, les affrontements, certes, sporadiques entre anti et pros Morsi et entre ces derniers et les forces de l'ordre, à travers tout le pays, ne sont pas de bon augure. Ce coup de force contre un président élu démocratiquement pose problème même si Morsi a été chassé par la "légitimité populaire", moins de trois ans après le sort identique subi par Moubarak, le Pharaon. Le renversement d'un président passé par les urnes a embarrassé la communauté internationale même si aucune grande puissance occidentale n'a osé parler de coup d'Etat, une posture imposée par les Etats-Unis contents de retrouver les militaires égyptiens garants des accords de paix avec Israël. Il ne s'est trouvé que la Turquie pour condamner cette situation "inacceptable" et sans le clamer fort, Hamas, de l'enclave palestinienne de Gaza, franchise des Frères musulmans. Les salafistes du Caire eux aussi ont rejoint le nouveau pouvoir, préférant l'armée à leurs alter ego islamistes. Pour le moment, tandis que les forces de sécurité égyptiennes tentent de déjouer toutes velléités de résistance et de contre-offensive de la part des Frères musulmans, d'autant que les heurts se poursuivent à travers tout le territoire et que l'islamisme radical et violent a déjà sévit dans le pays, le nouveau pouvoir se met en place. Le nouveau "maître" de l'Egypte, qui a fait ses premiers pas sur le devant de la scène politique publique, depuis mardi, au plus fort de Tamarrod sur l'emblématique place Tahrir et aux abords du palais présidentiel : Sissi. Ministre de la Défense, président du Conseil suprême des forces armées (CSFA), le général Abdel Fattah al-Sissi est sans conteste celui qui détient les rênes du pouvoir en Egypte. C'est lui qui a annoncé la mise à l'écart du raïs et annoncé la nouvelle "feuille de route" au sommet du pouvoir, à laquelle il a pris soin d'associer l'opposition et les plus hautes autorités religieuses du pays. Décrit comme pieux et nationaliste, ce Cairote de 58 ans, nommé lui aussi par Morsi il y a près d'un an, n'a eu de cesse de redorer l'image très controversée de l'armée durant la première phase post-Moubarak ou elle a géré directement le pays. Les hélicoptères déployant le drapeau égyptien, qui ont encore bourdonné dans le ciel du Caire, portent ainsi sa marque. Comme les scènes de fraternisation au sein des anti-Morsi. La figure la plus populaire et la moins controversée du nouveau régime : Baradei, le Prix Nobel. Mohamed El-Baradei est désormais le leader de la vaste coalition d'opposition qui a bouté Morsi hors du pouvoir. Son camp a choisi ce Prix Nobel de la paix (2005), ancien patron de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), pour le représenter dans la mise en place de la transition politique annoncée par l'armée. On parle de lui comme chef de gouvernement chargé de la mise en application de la feuille de sortie de crise du général Sissi : préparer l'architecture de la nouvelle Egypte. L'ex-diplomate, longtemps fonctionnaire international, souffre toutefois d'un déficit de notoriété dans l'Egypte profonde et rurale. Il reste qu'on se demande en Egypte et ailleurs sur ce qui va se passer dans les semaines à venir ? Des heurts graves sont à redouter, des structures activistes des Frères musulmans les plus radicales, sont capables de passer à l'acte, elles menacent de le faire. En outre, la situation politique peut également constituer un appel d'air pour des groupes djihadistes. Cependant, ils ne pourront pas résister à l'armée, très puissante, un Etat dans l'Etat, doté de fortes prérogatives politiques et économiques et que les Frères musulmans voulaient mettre au pas cette armée au nom de la démocratie, qui vient de redorer son blason, regagner sa popularité et sa légitimité. L'armée, qui a répondu aux désirs des manifestants pour mettre fin aux dérives autoritaires de Morsi et des Frères, saura-t-elle arrêter la descente aux enfers de l'Egypte, résoudre la gravissime crise économique ? Morsi aura néanmoins réussi à unir les forces anti-islamistes égyptiennes et à les mettre en phase avec l'armée. Les Frères ne peuvent à présent compter que sur leur noyau dur électoral et militant et s'ils s'opposent violemment à l'armée, ils sont condamnés à tomber dans le piège de l'alliance fatale avec les djihadistes terroristes. Les islamistes égyptiens se sont retrouvés pris dans leur propre piège. D. B Nom Adresse email