La police turque refait usage de gaz lacrymogène et de canons à eau depuis samedi soir pour empêcher les manifestants d'occuper la place Taksim d'Istanbul, le bastion de la fronde contre le gouvernement. Erdogan a à l'esprit la place Tahrir, l'épicentre du "printemps égyptien" de 2011 et de sa récente rectification par le mouvement Tamarrod qui a fait chuter le pouvoir islamiste. Réunis à l'appel du collectif Solidarité Taksim, à l'origine de la contestation, les manifestants se sont heurtés à l'imposant dispositif de la police antiémeute qui leur barrait les accès à la place, avant de se disperser sur la grande avenue piétonne Istiklal et dans toutes les rues environnantes. Equipées de boucliers et de masques à gaz, les forces de l'ordre se sont ensuite déployées autour de la place tentent d'empêcher le retour des contestataires. "Tamarrod" a donné de nouvelles idées au collectif turc anti-Erdogan qui ne se contente pas d'appeler à manifester pour réinvestir le parc Gezi, dont la destruction annoncée a lancé la contestation le 31 mai dernier. Les anti-Erdogan, qui avaient remporté une première manche avec l'arrêt de justice rétablissant le parc dans ses fonctions premières, suivent de très prêt la situation en Egypte qu'ils comparent à celle qui prévaut en Turquie avec également un pouvoir islamiste cherchant à imposer sa propre idéologie fondée sur la charia, avançant par étapes, en violant la laïcité héritée d'Atatürk. Les manifestants turcs vont jusqu'à comparer aux juges égyptiens qui ont donné du fil à retordre à l'ex-président islamiste d'Egypte les magistrats d'Istanbul qui ont annulé début juin le projet d'Erdogan d'aménagement de la place Taksim et la suppression du parc Gezi, au motif que la population n'avait pas été consultée et qu'il viole son "identité". Le Premier ministre turc veut y installer un hyper marché et une méga mosquée. Cette décision, qui n'a été rendue publique que cette semaine, a été saluée comme une victoire par les opposants au projet. Le 31 mai, la police turque était violemment intervenue pour évacuer les militants écologistes du parc Gezi qui s'opposaient à l'arrachage de ses 600 arbres et la violence de cette intervention avait suscité la colère de nombreux Turcs et transformé le mouvement de défense du parc Gezi en vaste fronde politique contre le gouvernement islamo-conservateur turc, arrivé au pouvoir en 2002. Selon des évaluations de la police, quelque 2,5 millions de personnes sont descendues dans la rue dans près de 80 villes pendant trois semaines pour exiger la démission d'Erdogan, accusé de dérive autoritaire et de vouloir "islamiser" la société turque. Le parc Gezi a été occupé pendant plus de deux semaines par des milliers de manifestants, qui en ont été délogés manu militari par la police le 15 juin. D. B Nom Adresse email