M. Mohamed Lazouni, commissaire principal en retraite et ancien sous-directeur de la prévention à la DGSN nous livre, dans cet entretien express, ses impressions sur la flambée des accidents de la route ces dernières années. Il insiste sur la nécessité de faire respecter la loi et de revenir au système de tribunal de simple policier. LIBERTE : Quel commentaire faites-vous au lendemain de l'accident dramatique survenu à Dély Ibrahim et qui a fait neuf morts ? • Mohamed Lazouni : C'est vraiment horrible et criminel ce qui s'est passé mardi à Dély Ibrahim. Je suppose que les vrais responsables ne sont pas responsables de ce qui se produit, chaque jour, sur nos routes. L'accident de Aïn Allah n'est pas le premier. On a assisté plusieurs fois au renversement de containers. Les gros camions transportant des containers sont-ils soumis à un contrôle rigoureux à la sortie du port ? Qu'est-ce qui empêche de procéder à la vérification du câblage ? S'agit-il d'un laxisme ou d'un laisser-aller des services concernés ? Ces dernières années, on assiste à énormément d'accidents sur les routes qu'on peut aisément éviter par rigueur seulement. La solution ne se limite pas uniquement à pondre des textes. Je le dis et je le répète encore une fois, il est temps de revenir au tribunal de simple policier qui existait par le passé. Il s'agit, en fait, du tribunal qui aura pour mission la gestion des amendes et des procès-verbaux d'infraction. Ainsi, on rétablira l'autorité et la crédibilité de l'Etat. Il faut reconnaître que l'impunité des contrevenants y est pour beaucoup dans la flambée des accidents. Ces dernières années, la route tue plus que le terrorisme... • En effet, viendra le moment où le phénomène du terrorisme sera maîtrisé, cependant autant il y a une régression du terrorisme, autant il y a une progression des accidents. La mort est un drame. Les statistiques officielles renseignent que la situation a atteint des proportions des plus alarmantes. Pour l'année dernière, on a recensé 38 893 accidents corporels qui ont fait 3 768 tués. C'est effarant pour un parc national de 2 millions de véhicules. Ces chiffres macabres ne sont pas atteints en France où 32 millions de voitures sont en circulation. Quelles mesures à prendre dans l'immédiat ? • Aujourd'hui, l'automobiliste n'a pas peur du gendarme. Il faut donc œuvrer dans le sens de rétablir l'autorité et la crédibilité de l'Etat à travers l'agent de police. Nous ne sommes pas supérieurs aux Allemands qui sont intransigeants face aux contrevenants. Il est impératif de faire aboutir la sanction qui ne peut être dissuasive que si elle est exécutée immédiatement. Actuellement, il est accordé un délai de 30 jours pour régler l'amende à l'image du système français qui est performant et informatisé, alors que notre système est archaïque. Pourquoi a-t-on importé ce système alors qu'on n'a pas les moyens de cette politique ? • À cet effet, je lance un appel aux citoyens de ne pas recourir à une relation pour lever une sanction. Cessons ces interventions. Ces pratiques encouragent les contrevenants à récidiver. Au lendemain de l'accident de Aïn Allah, c'est le branle-bas le combat sur les routes. Tous les gros camions sont soumis au contrôle. Ensuite, on assistera à un relâchement. La prévention ne doit pas être ponctuelle. Et le permis de conduire à points... • Ce système de sanction appliqué en France ne correspond pas à notre société, pour le moment. Jusqu'à présent, l'administration n'est pas en mesure de délivrer un permis dans 48 heures. Il faudra attendre une année et plus pour l'obtenir. L'application de ce système exige la mise en place d'un système informatique fiable. Ainsi, faut-il relever que beaucoup d'Algériens possèdent un double permis (l'original et le duplicata). Après le retrait du document original, on se fait délivrer un duplicata en présentant une simple déclaration de perte. R. H.