Le processus de changement est beaucoup plus complexe et difficile que d'exiger le départ d'un président. L'Egypte vient d'en donner l'exemple édifiant. La démocratie, ce n'est pas seulement des élections transparentes, encore moins le pouvoir absolu de la majorité, comme a bien tenté de le faire le désormais ex-chef de l'Etat, Mohamed Morsi, mais bel et bien la capacité d'un gouvernement, aussi légitime soit-il, à parvenir au compromis politique. Si l'Occident, en général, et les parrains du Printemps arabe, en particulier, ont bien évité d'utiliser le mot "coup d'Etat", c'est parce que la mobilisation de plus de 15 millions d'Egyptiens dans le cadre du mouvement "Tamaroud" et du "Front national du salut" a été l'expression d'un peuple qui a refusé que la dictature du système Moubarak soit remplacée par une autocratie, même si la majorité d'entre eux ont voté Morsi. Les Egyptiens ne veulent pas d'un Etat "laïc" ni d'un Etat "islamiste". Ils veulent une Egypte pour "tous les Egyptiens", en soi une République. C'est dans cette optique qu'il faudrait arriver à une solution qui satisfasse toutes les parties et qui puisse remettre le pays sur les rails. Dans cette guerre "de tous contre tous", seule l'armée semble détenir encore les cartes en main afin de réunir le consensus. Mais dans cette épreuve que traverse l'Egypte depuis la révolution du 25 janvier 2011, la mission du gouvernement de transition est non seulement de mettre fin à la crise, mais aussi et surtout d'éviter que le même scénario du 3 juillet dernier ne se reproduise à nouveau. Il s'agira, en fait, de mettre en place les garde- fous nécessaires pour asseoir une démocratie où le rôle de la religion doit d'abord être codifié. Des partis islamistes qui prônent l'islam dans un pays musulman, où l'islam est religion d'Etat, ne favorisent-ils pas les tensions et les divisions ? Au-delà du combat pour la liberté, la vérité et la justice, le peuple égyptien a montré qu'il n'y avait aucun tabou à contester un président, même issu du mouvement des Frères musulmans. Le pari sera alors de pouvoir fédérer toutes les tendances politiques afin de jeter les nouvelles bases de la démocratie et revenir ensuite au processus électoral. n Nom Adresse email