C'est une véritable plaidoirie que le président de l'Association pour la préservation des cimetières d'Alger (Apca), Farouk Zergaoui, a faite en guise de présentation de la situation qui prévaut dans la majorité des lieux où reposent nos morts. C'est aussi un réquisitoire à l'endroit des responsables concernés par leur prise en charge. La capitale dispose de 141 cimetières dont 106 musulmans, 34 chrétiens et un de culte israélite. Deux organismes sont chargés de leur entretien : les APC et l'Egpfc (Epic de gestion des pompes funèbres et cimetières). Les problèmes soulevés par le conférencier sont, pour la majorité, imputables aux municipalités qui, faut-il le rappeler, ne disposent que d'un budget réduit pour cette rubrique. On en veut pour preuve cette comparaison établie à la suite des sorties de l'Apca sur le terrain. Sur les 56 cimetières visités, une trentaine est gérée par les mairies. L'état des lieux est loin d'être reluisant. "Les gardiens salariés de l'APC sont rarement présents et pour les contacts, ces derniers se contentent d'accrocher le numéro de leur téléphone mobile sur la porte du magasin à outils ou à l'entrée du cimetière. Les portes d'accès sont souvent défoncées, ce qui facilite les intrusions inopportunes. Dans certains cimetières, il n'y a pas d'enceinte. Quand cette dernière existe, elle présente d'importantes brèches. Les municipalités sont très peu soucieuses du désherbage, souvent pris en charge par les citoyens volontaires. Ce qui est aussi valable pour les détritus et les gravats. Pour ce qui est de l'ouverture des tombes, cette opération n'est, dans la plupart des cimetières, pas assurée par les services de l'APC, et c'est bien sûr le bénévolat qui prime. Quant à la gestion des archives, les seules informations fournies se font à partir des seuls registres de l'état civil au niveau de la mairie", déclare le président de l'Apca. En revanche, ajoutera l'orateur, "la situation est meilleure à l'Egpfc, disposant tout de même d'un budget de wilaya, où le gardiennage, les clôtures et autres opérations de désherbage, creusement des tombes moyennant une contribution financière modeste sont assurés de manière relativement convenable, à quelques petites exceptions près". À noter que d'un côté comme de l'autre, les notions de carrés, rangées et rangs restent inconnues, ce qui oblige les visiteurs à se souvenir de l'emplacement des sépultures de leurs proches. Comme on peut aisément le constater, cet état des lieux est assez éloquent pour exprimer la situation de dégradation dans laquelle se trouvent les cimetières d'Alger. Du moins pour une bonne partie. Pis encore, on compte 14 cimetières chrétiens pratiquement en état d'abandon, alors que certains sont livrés aux bandes de délinquants qui en font des lieux de débauche. Des actes d'agression et de vandalisme y sont souvent signalés. Le cas d'El-Kettar est connu de tous pour servir de nid aux toxicomanes et délinquants de tout acabit. Ici, dès le soir venu, la parole est aux armes blanches et la moindre intervention coûterait cher au simple citoyen. "Passer son chemin sans être agressé est déjà une prouesse", dira un citoyen rencontré près de ces lieux. Pourtant, durant la journée, le calme y règne en maître. Ça ne peut être autrement pour un cimetière. El-Kettar, où reposent en paix plusieurs générations d'intellectuels, d'artistes, de moudjahidine côtoyant de simples dockers de la ville d'Alger. Le cimetière mérite une attention particulière pour ce qu'il représente comme repère et symbole de la capitale. Cependant, miracle, quelques très rares cimetières sont, comme le signale le président de l'Apca, "admirablement gérés et entretenus, dont un par des bancs publics pour le repos et le confort des visiteurs avec en prime un bassin contenant des poissons rouges. Il s'agit du cimetière de Zéralda". En conclusion, rien de tel que cette pensée de l'Apca : "Les cimetières : à notre mort, ils seront la demeure éternelle des restes de notre corps, ils contiennent les restes de nos parents et toute notre famille que nous continuons à aimer. Par respect pour leur mémoire, nos cimetières doivent rester dignes." A F Nom Adresse email