Annoncée par le Premier ministre lors d'une étape de son circuit de campagne, la participation de chercheurs algériens à des programmes de la Nasa a fait le "buzz", dans le style cocardier qu'on affectionne dans notre métier. Dans le pur esprit "maâk ya el Khadra", ces scientifiques "qualifiés" pour des projets internationaux serviront à masquer la carence nationale en matière de recherche fondamentale et de recherche-développement. Le Forum euro-méditerranéen des instituts des sciences économiques (Femise) vient nous rappeler cette triste réalité en nous classant à la 134e place sur 141 pays, dans une étude sur l'innovation en Méditerranée. On savait que l'Université était à la traîne des standards mondiaux, mais à cela s'ajoutent les blocages au développement de l'entreprise de production qui sanctionnent la fonction recherche et développement. À quoi sert-il d'innover dans une économie à laquelle on ne demande de produire que de l'alimentation ? À peine y doit-on varier les recettes et les dosages d'ingrédients. Paradoxalement, l'unique secteur innovant exportateur serait celui des TIC. Et ce, malgré un véritable frein politique à l'expression des compétences en la matière. C'est que, justement, ce secteur n'a pas besoin d'intervention institutionnelle pour son développement. Le phénomène des hackers, très habiles et très nombreux dans le pays, prouve, par opposition, que la recherche et l'innovation dans les domaines à fort besoin en équipements stagne parce qu'il n'y a pas d'investissements structurels. En un mot, l'Algérie n'a pas un problème de chercheurs — malgré le sous-développement universitaire, il s'en forme suffisamment — mais un problème de politique de recherche. Sinon un problème politique tout court : la culture de la rente a tué la culture de l'effort. Comme l'expliquait récemment le docteur Fouad Bouguetta, de l'Université d'Annaba, au quotidien El Watan : "Il faut travailler à déconstruire cette culture rentière qui mine tout le système social en valorisant l'effort, le mérite et la responsabilité, et ceci commence par des innovations au niveau de la gouvernance de toutes les institutions qui doivent devenir plus inclusives, plus communicantes, plus transparentes, plus efficaces et qui savent reconnaître et récompenser les plus méritants." Et de préciser : "Pour sensibiliser à l'innovation et l'entrepreneuriat, c'est-à-dire les rendre désirables, il faut d'abord innover en termes de gouvernance, de programmes et de méthodes." En d'autres termes, il faut, qu'en plus des stratégies de développement de technologie, soit adopté le principe consistant à mieux rémunérer la productivité scientifique et technologique que l'obédience politique, par exemple. Si la santé va mal, ce n'est pas non plus lié à un problème de potentiel humain ; c'est la gestion de la santé et de la médecine qui sanctionne la santé publique. C'est le système rentier rétribuant prioritairement le soutien politique qui a fait que l'ultime reconnaissance pour un grand professeur est d'être promu ... député ou sénateur dans des chambres d'enregistrement. La rente est créatrice de médiocrité. Elle n'innove qu'en matière de privilèges stériles. Elle favorise "la stabilité" du régime et condamne le pays au retard économique et culturel. M. H. [email protected] Nom Adresse email