Deux évènements ont marqué l'actualité nationale de ces dernières semaines, le remaniement ministériel et le mouvement dans le corps des walis dont quatre au rang de ministre. Considérée comme dépositaire de l'autorité légale de l'Etat, la wilaya est dans la tête de la majorité des citoyens ce bâtiment qui est le lieu par excellence des réunions dans lequel on entre à 8h du matin et dont on en ressort l'après-midi. Cette institution fait notamment forme d'organisation relativement méconnue dont le rôle et l'existence ne sont correctement perçus que par les cadres et les membres de l'exécutif de la wilaya composé des directeurs de structures de l'Etat, qui assument, sous l'autorité du wali, la gestion des différents secteurs d'activité de la wilaya. Schématiquement, en plus de l'administratif : l'équipement, le transport, l'infrastructure, le logement, la santé, le développement social et culturel, l'animation économique, le budget, le maintien de l'ordre public, etc. Sincèrement, l'administration n'est pas un pouvoir suprême à l'heure de la démocratie (pluralisme), mais tout simplement la gestion et le développement des services publics et de l'environnement à assurer à la collectivité nationale et aux agents économiques avec l'obligation de résultats pour une sortie de crise et préparer l'avenir face à l'évolution des mutations mondiales des sociétés ? Aujourd'hui, si l'on fait carrière dans la politique ou l'administration, c'est bien dans l'économie que l'on se fait un nom et une célébrité. Cela doit nécessairement nous interpeller sur l'évolution du rôle social, économique et politique de nos wilayas dans l'économie nationale en luttant contre la bureaucratie, le régionalisme et la marginalisation, qui sont les effets d'un crime envers les compétences, les élites locales et les citoyens d'honneur que chacun de nous doit assumer pleinement pour instituer la pensée critique en Algérie où chaque idée ou solution est plus importante que l'argent. De toute évidence, l'administration locale ainsi que les élus, les élites et la société civile sont la base principale d'un pays. C'est en cela que le wali revêt aujourd'hui une dimension politique de développement économique intégré régional pour un modèle de croissance et de développement d'une économie de l'après-pétrole dans la mesure où il gère un territoire de l'économie nationale. La question est finalement de savoir : le nouveau gouvernement de M. Sellal s'achemine-t-il vers une politique de renouveau se voulant une ère nouvelle sur l'avenir du développement économique de l'Algérie en conformité avec les nouvelles réalités politiques, économiques et sociales ? Pour cela, un mouvement et aussi des hommes qu'il faut à la place qu'il faut, car devenir wali, ministre ou dirigeant est très important et ne peut être le fruit du hasard. C'est surtout un palmarès, le résultat du travail, de probité, de volonté, de compétence et enfin, de l'homme de vision et du terrain. C'est là, semble-t-il, l'urgence pour l'Algérie de se doter d'un nouveau système d'un pouvoir de management stratégique et moderne pour un nouvel équilibre régional entre les pouvoirs locaux (l'administration et les élus) pour un rôle plus renforcé et responsable dans l'enceinte économique et sociale qui soulève, à cet effet, la problématique des retards dans les réformes du pays introduites en 1989. Cause des déséquilibres et des tensions socio-économiques actuelles et qui continue à susciter des inquiétudes et des contraintes, voire un blocage mental. Être moderne, développé, c'est d'abord l'être mentalement. L'exemple le plus frappant est celui du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, lors de sa visite de travail dans la wilaya de Tébessa du 2 octobre 2013, où il a dit ceci : "J'en ai marre. Là où je vais, je tombe sur les mêmes problèmes." Alors que malgré une rente importante, on continue à gérer le quotidien qui s'explique par un déficit de gouvernance où nos walis et nos élus locaux n'arrivent pas à s'assumer, malgré d'importants plans de relances initiés par l'Etat au profit des wilayas. "Aujourd'hui, c'est l'homme qui fait la fonction et non la fonction qui fait l'homme" dont le pays a besoin pour insuffler la vie et mobiliser les énergies, afin de répondre efficacement aux défis de notre temps et lutter plus efficacement contre toute déviation qui porte atteinte à la moralité et à la crédibilité de l'Etat. Avec ces hommes, il sera possible pour l'Algérie d'imaginer une nouvelle vision de l'action à partir de laquelle il est aisé de concevoir les formes d'organisation, de gestion et de contrôle. Il n'y a plus de place pour des responsables, non entièrement et profondément convaincus de la réussite de notre développement socioéconomique. La responsabilité est pour nous un devoir et non un honneur, elle est source de sacrifice et non de richesse. En effet, nous dépensons beaucoup d'argent en mettant en avant l'argent du pétrole et du contribuable, sans une planification stratégique qui aurait donné plus de sens et de pertinence aux budgets des wilayas qui, notamment, sont en constante augmentation et de plus en plus lourds pour le budget de la nation et en occultant l'homme à valeur H, car la puissance d'un pays repose nécessairement sur l'économie et les hommes/les structures et les hommes. Au cours de ces dernières années, 63% de la population totale vit dans les villes et près de 1 000 sur les 1 541 communes sont classées rurales. Faut-il alors rappeler qu'en 2006, il a donc fallu l'intervention de l'Etat pour leur assainissement où près de 30 milliards de dinars avec, en plus, un plan d'investissement en matière d'équipements et de moyens matériels. A-t-on alors besoin de rappeler au passage que l'économie algérienne repose, aujourd'hui, sur une seule ressource, celle des hydrocarbures (rente). Ce constat illustre donc une vision qui met en lumière les illusions d'une approche du développement économique qui n'intègre pas la valeur homme et qui pourrait être socialement fort coûteuse pour le pays. Ce genre de problèmes ne peut être surmonté par les seuls textes à caractère juridique et réglementaire, car la wilaya constitue aujourd'hui l'organe et l'assise de base de la politique du développement national, où l'Algérie n'est plus un petit pays ou une collectivité locale, et son économie ainsi que sa population ne peuvent ignorer plus longtemps l'impact et les conséquences dont la corruption, le chômage, l'inflation... qui se sont répandus à une allure vertigineuse dans notre pays et ont rongé nos institutions, voire même contribué à paralyser la vie socioéconomique et le fonctionnement des collectivités locales apparues hors des réalités du terrain. Par ailleurs, l'indifférence et le mépris affichés à l'égard des citoyens qui ont abouti souvent à des situations désastreuses, car l'administré ne pouvant trouver l'écoute et le droit d'égard. Cela a donné naissance dans la gestion locale à l'absence d'esprit civique et dans presque chaque wilaya la chaîne de contestations qui a ébranlé nos collectivités locales. Le wali est le délégué du gouvernement et l'ordonnateur unique au sein de la wilaya et sa mission consiste à veiller à la réalisation des programmes inscrits par l'Etat. Cette responsabilité nous paraît d'un poids administratif et politique importante dans l'échiquier national, aussi et surtout impressionnante, compte tenu de son ampleur, alors que l'organisation de l'Etat demeure fortement centralisé et l'absence d'une meilleure répartition des responsabilités pour une bonne gouvernance publique. Dès lors, l'on ne peut que se poser une question : nos wilayas sont-elles préparées tout particulièrement à l'après-pétrole en rapport avec l'évolution des mutations économiques mondiales ? En effet, La force d'un pays ne réside pas aujourd'hui dans l'importance de l'abondance des budgets, mais bien plus dans l'habileté et la méthode avec lesquelles il gère et contrôle ses ressources. Cela pose de manière tout aussi récurrente la question de la gestion et du contrôle des finances publiques de nos régions chères à la population à laquelle il est urgent de remédier et de proposer des solutions pérennes, car les choses sont devenues plus compliquées face à la crise de confiance entre les élus, l'administration et les populations à l'origine de la pression de la rue notamment, sur fond d'un constat peu reluisant sur la gestion et la gouvernance locale quand on voit la détresse des populations à travers ces émeutes causant des pertes matérielles considérables et dramatiques en vies humaines, des caves occupées à titre d'habitation, des familles abandonnées à leur triste sort faute de logis, l'accroissement de la délinquance, les immolations, les harraga, les vols, les SDF, les malades mentaux errants dans nos villes sans assistance sociale face à une grande indifférence (...). Il n'y a pas, à notre connaissance, une wilaya qui ne possède pas aujourd'hui de potentialités petites, moyennes ou grandes qu'il faille mettre au service de l'investisseur et de l'entreprise. D'où, l'impérieuse nécessité de multiplier l'organisation de rendez-vous de l'économie et de la finance au niveau local sur lesquelles se fondent les traditions et les valeurs des populations (travail, production et capital). En effet, nous attendons de nos walis le déploiement des indicateurs économiques, financiers, sociaux et culturels. C'est d'ailleurs dans ces domaines stratégiques qu'elles sont appelées, aujourd'hui, à établir et à développer des rapports bien réels. Mieux, ce serait ainsi axé sur le rapport économie et la société qui, jusque-là, le rôle de nos walis n'est pas appréhendé comme il se doit et a souvent peu évolué, car il se trouve sur le terrain un manque à gagner important en matière de création d'emplois, de richesses, de revenus fiscaux, de valorisation des ressources, des revenus de leur patrimoine, etc. Alors que le wali, en tant qu'acteur direct de l'Algérie profonde, devrait être l'expression réelle des préoccupations du développement économique local. Quel serait alors la solution pour la bonne gouvernance territoriale de nos wilayas ? De notre point de vue, la régionalisation comme nouvelles perspectives et par laquelle toutes les forces vives de la nation s'impliqueront dans la gestion pour donner une impulsion au niveau de l'administration locale, missions dont doivent être investis aujourd'hui les walis, les élus, les élites et la société civile pour initier des programmes économiques régionaux en toute autonomie. Dans cette optique, la régionalisation, que nous préconisons, vise six buts appropriés constituant le défi algérien : une gouvernance socioéconomique intégrée et solidement établie ; de nouveaux acteurs associant solidairement les élus, l'administration locale, la société civile, l'élite locale et les notables ou citoyens d'honneurs méritant d'être pris en considération avec force dans la mesure où ils sont bien les sujets des grandes valeurs du progrès et du développement durable ; de nouvelles règles et mécanismes pour une politique budgétaire transparente et pluriannuelle à moyen et long termes appuyée de contrats de performance dans la gestion locale ; un système économique et financier rénové et adapté ; un modèle de croissance et de développement d'une économie diversifiée et hors hydrocarbures, et de nouvelles structures et de nouvelles compétences vont émerger. En effet, la régionalisation est indispensable pour garantir et conduire au niveau de la région le développement économique local avec plus d'Etat de droit et de démocratie évinçant les gestions autoritaires et bureaucratiques entravantes, c'est-à-dire s'assurer : 1- Une place importante et stratégique des walis dans le développement durable, la politique économique et sociale du pays. 2- La liberté de la presse qui véhicule l'information et contribue au développement de la société, a un grand rôle à jouer dans la démocratie, et la lutte contre la corruption doit retenir davantage l'attention des pouvoirs publics en vue d'un meilleur développement et promotion d'une presse libre et indépendante incontournable et vitale dans le processus démocratique. 3- Là également intervient le concept de contribuable intéressé à l'importance de l'utilisation et du contrôle de l'argent public et la rentabilité des finances publiques dans le développement local. C'est un pas important dans la gouvernance du pays notamment, désengager les pouvoirs publics d'une forte concentration des pouvoirs et pour plus de maîtrise, d'efficacité et de transparence dans la gestion des ressources et des dépenses publiques. Pour cela, leur nomination devra impérativement être soumise à un contrat de performance. Cette obligation est d'ordre d'intérêt public. M. A. (*) Financier et auteur de deux ouvrages : Comptabilité des sociétés et gouvernance des entreprises. [email protected] Nom Adresse email