Après la démission du Premier ministre tunisien, Ali Laârayedh, conformément à un accord négocié par la classe politique pour sortir la Tunisie de longs mois de crise, le ministre sortant de l'Industrie, Mehdi Jomaâ, lui succède, il doit former un cabinet d'indépendants devant conduire la Tunisie jusqu'à des élections en 2014. Ennahda, l'équivalent tunisien des Frères musulmans d'Egypte, n'a cependant pas l'intention de laisser tomber, et donne l'impression de n'avoir lâché du lest que pour mieux rebondir, plus tard. Ennahdha ferraille dur pour la future constitution qui doit être adoptée avant le 14 janvier, date du troisième anniversaire de la révolution contre le régime Ben Ali. Les poulains de Ghannouchi, lequel n'a cessé de caresser le rêve et l'ambition de faire de sa formation islamiste le modèle de gouvernance pour tout le Maghreb, s'inspirant de l'AKP d'Erdogan, négocient à la virgule avec l'opposition démocratique le contenu de la future Constitution, imposant pour ses principes sociétaux des concepts à plusieurs lectures et interprétations. Par exemple, pour les rapports hommes-femmes, cheval de bataille des islamistes et des groupes conservateurs ainsi que des pouvoirs arabes, quels qu'ils soient, la nouvelle loi tunisienne, présentée par les commentateurs comme texte "unique dans le monde arabe", n'énonce pas clairement l'égalité entre les sexes. Outre ce délicat sujet des droits et libertés de la femme, inscrit sous l'égide de l'égalité entre les citoyens et les citoyennes, "égaux devant la loi sans discrimination", la nouvelle Constitution fait l'impasse sur la charia, en stipulant que la Tunisie est un "état civil". Parallèlement à la poursuite du vote, article par article, sur fond de 400 demandes d'amendements de la part d'Ennahdha, l'Assemblée constituante tunisienne a enfin élu les membres de la future instance électorale (ISIE) dont la formation est cruciale pour que le gouvernement dirigé par Ennahdha passe la main à des indépendants que le nouveau chef du gouvernement désigné en novembre 2013 doit former. Chacun des candidats à la Commission devait obtenir les voix des deux tiers des 217 élus de l'Assemblée nationale constituante où Ennahdha n'a pas la majorité absolue. La désignation de la Commission électorale, comme la nouvelle loi fondamentale, n'a pas été facile car son processus s'est également déroulé dans un climat de méfiance entre l'opposition et les islamistes d'Ennahdha. De difficiles négociations étaient en cours depuis des mois pour former l'institution qui aura la lourde tâche d'organiser les prochaines élections. Par ailleurs, depuis l'été, la justice administrative a annulé à deux reprises la procédure pour former l'ISIE en raison de vices de forme. Seuls trois personnalités sont passées comme une lettre à la poste : la magistrate Lamia Zargouni, l'avocat Kamel Toujani et l'universitaire Chafik Sarsar. Pour les six autres membres de cette instance indépendante, il a fallu marchander dans le pur style levantin. Ainsi, après de fortes divergences sur les candidatures de Kamel Toujani et Anouar Belhassen, un accord devait finalement être trouvé sur la liste des 9 membres de l'ISIE. Les dirigeants de l'opposition, qui rejetaient ces deux candidats proches du parti islamiste Ennahdha, ont dû faire une concession en les acceptant afin de débloquer la situation. D. B Nom Adresse email