La première consultation populaire, depuis l'éviction du président islamiste Mohamed Morsi en juillet dernier, qui a débuté hier, sera suivie d'une élection présidentielle où l'homme fort, le patron de l'armée, est tout désigné pour briguer le fauteuil présidentiel. L'armée, qui détient la réalité du pouvoir, a tenu à ce que les électeurs se déplacent en masse et à ce que son texte soit massivement approuvé pour légitimer — par les urnes — la destitution de Morsi et sa lutte contre les Frères musulmans qui ont par ailleurs boycotté le référendum et émaillé sa campagne électorale et son déroulement par des incidents meurtriers. Les mesures de sécurité ont été renforcées au maximum dans tout le pays. Le ministère de l'Intérieur a déployé 220 000 policiers et 500 unités de combat. Des militaires sont également mobilisés pour l'occasion contre les Frères déclarés "groupe terroriste" le 25 décembre 2013 et qui font l'objet depuis le 3 juillet, date de destitution de Morsi leur candidat, de répressions par les forces de sécurité qui ont fait des milliers de morts. Il n'en demeure pas moins que deux heures avant l'ouverture des bureaux de vote, un attentat a visé un tribunal du Caire, sans faire de victime, selon des médias. "L'Egypte est au seuil d'une étape décisive de son histoire, dont le résultat est attendu par le monde entier", a déclaré, la veille du scrutin, le général al-Sissi, qui a évoqué publiquement sa candidature à la présidentielle. "Si je suis candidat, il faut que ce soit à la demande du peuple et avec un mandat de l'armée", a précisé le chef de l'armée égyptienne, âgé de 59 ans, présenté par ses partisans comme un "sauveur", seul en mesure de ramener le calme et la stabilité dans le pays après trois années de chaos, depuis le renversement du président Hosni Moubarak. Les banderoles pour le "Oui à la Constitution" étalées à profusion dans le pays, ont pour fond la photo du général en uniforme, entre Nasser et Sadate également en tenue de général. Significatif et éloquent raccourci pour lier l'approbation de la nouvelle Loi fondamentale à l'élection future d'al-Sissi. L'enjeu de ce référendum est surtout la participation des électeurs pour montrer au monde occidental que ce qui s'est passé en juillet dernier était une révolution populaire contre Morsi. Le secrétaire américain à la Défense, Chuck Hagel, qui s'était entretenu au téléphone dimanche avec le général Sissi a souligné l'importance d'un référendum transparent au cours duquel tous les Egyptiens doivent avoir l'occasion de voter librement, a dit un porte-parole du Pentagone. Si les partisans du général pouvaient crier son nom avec des pancartes en sa faveur, aucune trace des partisans du "non". Ceux qui ont appelé à rejeter le texte de l'armée ont été quasiment dans l'impossibilité de faire campagne. Cela a été le cas pas seulement pour les Frères acculés à la clandestinité. Le mouvement militant du 6 Avril, artisan de la révolution du Nil ou encore le parti Egypte forte qui appelait à voter "non", avant de décider de boycotter le référendum. Ils n'ont pas obtenu de lieux pour faire campagne. Les 65 chaînes de télé et les centaines de radios leur ont été fermés au nez. La police a raflé des militants du "non" qui collaient leurs affiches. L'article 65 du projet de Constitution garantit pourtant la liberté d'expression. Mais Al-Sissi s'est libéré de l'emprise de Washington au point d'avoir rejeté le milliard et demi de dollars qui entraient dans le budget de l'armée depuis les accords de Camp David de 1978. Le président islamiste a été destitué sous l'impulsion de l'armée, à la suite de manifestations monstres contre sa politique dans plusieurs villes du pays. La nouvelle Constitution remplacera celle qui avait été signée par Mohamed Morsi il y a un peu plus d'un an et avait également été approuvée par référendum avec un très faible taux de participation. La nouvelle Loi renforce les institutions qui s'étaient opposées à Morsi : l'armée, la police et la justice et elle est approuvée par le parti salafiste Nour, l'institution islamique Al Azhar et les chrétiens de l'Eglise copte orthodoxe. D. B Nom Adresse email