Dimanche 16 mars, on a demandé aux habitants de la Crimée d'opérer un choix impossible : se prononcer pour l'assujettissement à la Russie, ou en faveur de l'indé-pendance – mais sans la moindre garantie que la Russie manifeste dans l'avenir un plus grand respect pour la souveraineté d'une Crimée indépendante qu'elle ne le fait aujourd'hui pour l'intégrité territoriale d'une Ukraine indépendante. La Russie a manifestement veillé à mettre toutes les chances de son côté. C'est une sorte de pile ou face joué d'avance : face, c'est la Russie qui gagne ; pile, c'est la Crimée qui perd. Il ne fait absolument aucun doute que cette consultation – quel que soit son résultat – est à la fois illégale et inconstitutionnelle. La Constitution ukrainienne est en effet extrêmement claire : un tel scrutin ne peut être organisé qu'à la demande de trois millions de citoyens ; il doit se dérouler sur l'ensemble du territoire ukrainien ; enfin, il ne peut être décidé que par le Parlement ukrainien. Aucune de ces conditions n'a été remplie. Le résultat du vote est donc illégitime. Comment pourrait-il en être autrement d'un scrutin organisé à l'ombre des troupes russes, dans une région sous occupation militaire ? Ce genre de question devrait être réglé par des référendums libres, honnêtes et organisés selon la loi – comme ce sera le cas en Ecosse dans quelques mois. Or le référendum de dimanche dernier en Crimée n'a été ni libre ni transparent. Depuis une vingtaine d'années, nous nous sommes efforcés d'oublier la tension et la méfiance de la guerre froide, et de reconnaître l'importante et positive contribution que la Russie apporte à la communauté internationale – et à la prospérité de tous ses peuples. Un ensemble d'institutions et d'accords internationaux a été mis en place tant pour éviter de reproduire les âpres confrontations du passé que pour résoudre pacifiquement les querelles. Des organisations telles que l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe ou le Conseil de l'Europe, dont la Russie est membre à part entière, sont là pour aider les Etats à régler les questions d'autodétermination et à défendre les droits des minorités. Pour sa part, l'OSCE – gardienne de l'intégrité des processus électoraux – a déclaré que le référendum était illégal et qu'elle n'a pas d'observateurs sur place. Il n'est cependant pas trop tard. La Russie peut encore utiliser ces institutions, s'engager sérieusement dans la voie diplomatique et trouver une solution pacifique. Nous exhortons le président Poutine à utiliser son autorité pour le bien de la Crimée, de l'Ukraine, de l'Europe et de la Russie, et à mettre fin à cette crise. M. R. (*) Ambassadeur de Grande-Bretagne en Algérie Nom Adresse email