L'ex-FIS is back. À la faveur de la confusion politique et des appels du pied de certains candidats, les anciens dirigeants du parti dissous s'engouffrent dans la brèche de la campagne électorale. Le consensus national sur les responsables de "la tragédie nationale" est menacé. Abassi Madani, Ali Benhadj, El-Hachemi Sahnouni, Madani Mezrag, Anouar Heddam, Mourad Dhina sont tous sur le pont. vingt-deux ans après sa dissolution, les résidus de l'ex-FIS, sorte de conglomérat informel des anciens islamistes, sont en train de refaire un retour inattendu sur la scène politique. Ce qui était des indices, sont devenus depuis quelques jours des faits. Tout a commencé timidement avec le mystérieux groupe "le Front du refus". Un groupe créé miraculeusement durant la campagne qui ramasse des terroristes et des repentis lié à l'organisation terroriste Rachad installée en Suisse. Existant en Europe sous différentes appellations de "Karama" à "Justicia Universalis" ou "l'association Hoggar", ce groupe est derrière les plaintes déposées contre l'ancien ministre de la Défense, le général Khaled Nezzar. La nouveauté est que ce groupe a investi la rue, à la faveur des manifestations du mouvement Barakat, pour revenir dans l'espace public. Bousculant même l'association SOS Disparus, connue pour ses liens avec l'Internationale islamiste. Paradoxalement, "le Front du refus" agit comme un troisième larron dans la galaxie des organisations salafistes. D'un côté, le "Front de la renaissance libre islamiste salafiste algérienne" d'Abdelfattah Zeraoui Hamadache. De l'autre, Ali Benhadj et ses apôtres qui ont investi la salle Harcha durant le meeting des partis du boycott. Avec cette nouvelle organisation, supportée par la chaîne pro-qatarie, El-Magharibia, dont les propriétaires sont les propres fils d'Abassi Madani, qui émet depuis Londres, le dispositif islamiste reprend forme. Mais il demeurait trop embryonnaire et surtout marginal. C'est le candidat Ali Benflis qui va redonner corps à ce bric-à-brac islamiste. Ses déclarations aux meetings de Mila et d'El-Khroub disant que "ceux qui ont été exclus de l'exercice politique font partie de la solution" est un appel inespéré que les anciens de l'ex-FIS allaient saisir au bond. Certes, Benflis, ancien ministre de la Justice sous Hamrouche, avait démissionné en son temps lorsque l'Armée a décidé de créer les camps d'internement administratif dans le Sud, mais sa relance est un coup de poker hasardeux. En désignant l'ex-FIS comme faisant partie de la solution, Benflis n'ignore pas qu'il plombe le consensus national sur le fait que l'ex-FIS faisait partie du problème. Si ce n'est le problème lui-même. Abassi Madani qui menait une existence opulente et tranquille dans sa villa à Doha ne s'est pas fait prier. Il appelle dans un communiqué à "l'arrêt du processus électoral", à "une période de transition" (terme à la mode actuellement), et estime, sans rire, que "l'élection présidentielle du 17 avril a été décidée avec traîtrise par le pouvoir en place en lien avec des intérêts étrangers" ! Abassi devenu un sous-Qaradaoui oisif qui profite d'un exil doré veut également se faire rappeler au bon souvenir de ses hôtes. L'émir du Qatar sera à Alger demain, et Abassi Madani veut faire partie de la solution. La réaction ne s'est pas fait attendre. L'imam El-Hachemi Sahnouni, ancien takfiriste, sort de son silence. Il appelle à voter Bouteflika. L'attitude n'est pas nouvelle. Sahnouni a été un des premiers à dénoncer le tandem Abassi-Benhadj au sein de l'ex-majliss echouri, les appelant en privé "les pyromanes". Mais c'est l'ancien chef de l'AIS, l'ex-branche armée du FIS-dissous, Madani Mezrag, qui pousse le bouchon un peu plus loin. Il retrouve des accents du maître-chanteur en soulignant que "les camps de Bouteflika et de Benflis avaient leurs chances de gagner le soutien du parti dissous, mais que le choix final irait pour celui qui donnerait les garanties exigées et qui tiendrait parole". Le casino est rouvert. Faites vos jeux. Ainsi, l'ex-FIS est en train de grappiller à nouveau les espaces d'expression. Doucement, son venin est en train d'empoisonner le débat politique qui commence à glisser vers une violence verbale et même physique (sabotage des meetings), qui nous rappelle les méthodes de ceux qui ont tenté de ruiner l'Algérie en 1992. Reste maintenant la responsabilité des candidats qui font campagne. Les lois existent. Celle de la Charte de la réconciliation nationale adoptée par référendum en 2006 est pourtant claire dans son article 26 : "L'exercice de l'activité politique est interdit, sous quelque forme que ce soit, pour toute personne responsable de l'instrumentalisation de la religion ayant conduit à la tragédie nationale. L'exercice de l'activité politique est interdit également à quiconque, ayant participé à des actions terroristes refuse, malgré les dégâts commis par le terrorisme et l'instrumentalisation de la religion à des fins criminelles, de reconnaître sa responsabilité dans la conception et la mise en œuvre d'une politique prônant la violence contre la nation et les institutions de l'Etat." Ce qui implique que le débat sur l'ex-FIS est clos. Malheureusement, certains oublient qu'il a été à l'origine de rivières de sang. M. B. Nom Adresse email