Né d'une initiative "spontanée" lancée par un groupe de citoyens, le mouvement Barakat a réussi à s'imposer dans le paysage de la campagne électorale et ses enjeux. Moyennant organisation de sit-in et médiatisation, les initiateurs de ce mouvement se sont retrouvés au-devant de la scène politique au lendemain de l'annonce de l'ex-Premier ministre, Abdelmalek Sellal, de l'intention du président Bouteflika de briguer un 4e mandat. Ainsi, le 22 février, un groupe de citoyens dont l'actuelle porte-parole du mouvement, Amira Bouraoui, se sont vu embarqués par des policiers en civil lors d'un premier sit-in tenu le jour même devant la faculté des lettres et sciences humaines de Bouzaréah, à Alger. Des images feront le tour de la Toile et l'intervention de Bouraoui lors d'une émission sur la chaîne privée Chourouk TV n'a laissé personne indifférent. La jeune femme, 38 ans, gynécologue de formation, affronte une députée FLN, avec arguments à l'appui, sur "l'incapacité du président Bouteflika, dont l'état de santé est critique, de rester à la tête de l'Etat". Ainsi, plusieurs sympathisants ont rejoint l'action à laquelle avait appelé Bouraoui pour tenir un sit-in contre un 4e mandat le 1er mars devant la fac centrale. Cette première action, qui a donné naissance au mouvement a été réprimée par les services de sécurité et des dizaines de manifestants ont été interpellés le jour même et embarqués dans différents commissariats de la capitale avant d'être relâchés. Le forcing exercé par les autorités pour empêcher ces sit-in n'a pu résister devant la médiatisation accentuée des actions qui ont suivi et les images d'interpellations qui commençaient à accabler les autorités algériennes. Et Barakat, qui a imposé le droit d'exister et d'agir, s'est doté, 15 jours après sa création, d'un texte fondateur annonçant "le rejet de l'élection présidentielle" et propose l'instauration d'"une période de transition gérée par les forces vives et saines de la nation, dans l'objectif d'instaurer une IIe République et d'en finir avec les 52 ans de marginalisation du peuple algérien". Le mouvement Barakat gagne du terrain en l'espace de deux mois, en se structurant en coordination nationale qui couvre une vingtaine de noyaux à travers plusieurs wilayas, notamment Batna, Annaba, Tizi Ouzou, Béjaïa, Tébessa et El-Bayadh. Cette structuration, qui a permis au mouvement de s'inscrire dans l'opposition durant la campagne électorale, a servi d'alibi aux partisans du 4e mandat qui n'ont cessé de le fustiger durant la campagne au profit du candidat Abdelaziz Bouteflika, en l'accusant frontalement de manipulation et d'œuvrer pour la fameuse "main de l'étranger". Des médias privés, à l'instar des chaînes de télévision Ennahar et Numidia News, ont décrit le mouvement comme "séparatiste" et "sioniste" et colporté de nombreuses accusations à ses membres, les soupçonnant d'appartenir à "des réseaux suspects". Cet acharnement sans précédent démontre l'importance de ce mouvement qui a pesé lors de la campagne électorale. Ainsi, on verra Abdelmalek Sellal, directeur de campagne du candidat Bouteflika, promettre l'instauration de la IIe République, l'une des principales revendications du mouvement. Ce dernier se projette au lendemain du 17 avril, avec de nouvelles actions s'inscrivant dans la durée. En dépit de la réticence de la rue et l'absence d'une vision de projet de transition, toujours en cours d'élaboration, le rôle de Barakat dans la conjoncture électorale dépendra de la retombée de celle-ci au lendemain de l'élection présidentielle. F. B Nom Adresse email