Trêve de suspense : tamazight ne sera pas faite langue officielle dans le cadre de la révision constitutionnelle en cours et c'est Abdelmalek Sellal, Premier ministre ès qualité, qui vient de nous le faire savoir, ce jeudi, depuis la tribune de l'Assemblée nationale. Cela n'aurait rien de surprenant ; le pouvoir ayant déjà laissé transparaître quelque peu ses intentions à ce propos, si M. Sellal n'avait pas fait état, ce même jeudi, d'un approfondissement de la "réconciliation nationale" qui devrait "concerner tous les Algériens" et qui réparerait tous les préjudices et injustices qui leur ont été infligés depuis 1962. Le déni et l'ostracisme dont ont toujours été frappées la culture et la langue amazighes sont ainsi de nouveau occultés. Ils pourront donc survivre à la réconciliation nationale qui, elle, passera carrément à la postérité puisqu'elle sera, selon toute vraisemblance, non seulement approfondie mais aussi constitutionnalisée en tant que valeur fondatrice de l'Etat algérien. Décidément, le pouvoir ne compte plus ses contradictions. Il en est toujours à marier l'eau et le feu puisqu'à ses yeux, réconciliation et déni peuvent se conjuguer. Il faut, peut-être, rappeler à M. Sellal que ce déni là et cet ostracisme là s'étaient longtemps traduits par la répression, l'emprisonnement et la torture. Que des militants de la cause amazighe, sans avoir un jour pris les armes, aujourd'hui disparus, emportés par des maladies provoquées par la maltraitance subie dans les geôles du parti unique. Que d'autres livrés, avec femme et enfants, à une misère matérielle absolue après avoir été privés de leur emploi qui était leur unique source de revenus. Que d'autres encore, plus jeunes, arbitrairement exclus du lycée ou de l'université, en guise de représailles contre leur attachement à leur langue maternelle. Que 126 jeunes, enfin, tués, en 2001 et 2002, pour que tamazight soir enfin reconnue langue nationale. Ne nous attardons pas ici sur ces arguments "techniques" avancés par M. Sellal pour justifier la reconduction d'un déni politique décennal. Ils ne tiennent pas la route. Preuve en est que le Maroc voisin les a dépassés. Car l'officialisation d'une langue est un concept politique, non technique. Son déni aussi, forcément. Cela étant, la sentence de M. Sellal n'est pas sans intérêt : elle disqualifie "globalement et dans le détail" les consultations menées par Ahmed Ouyahia pour une "Constitution consensuelle". Nom Adresse email