Elle est loin, avec un soleil incertain et des orages intermittents. Tébessa, grosse porte algérienne, donne sur la Tunisie et le désormais sinistre mont Châambi. De loin, viennent les échos "collatéraux" de la déstabilisation du pays voisin. Mais du côté algérien, la tendance est plutôt au renfort préventif dont profitent également les gardes-frontières tunisiens qui ont vite appris à collaborer contre le phénomène néfaste qu'ils viennent de découvrir : le terrorisme. Le commandant de la Gendarmerie nationale, le général-major Ahmed Bousteïla s'y est rendu, hier, pour inspecter ses troupes mobilisées depuis l'éclatement des événements en Tunisie. Après le poste avancé de Aouinet, il a consacré un long moment à Bouchebka qui fait face à une grande partie du mont Châambi où se sont repliés les terroristes tunisiens dont les activités se sont étendues jusqu'à la capitale Tunis. Premier point, le nouveau chantier de l'escadron des GGF. Les bâtiments construits en dur sont en phase d'achèvement. Le commandant des GGF détaille les missions dans son secteur qui s'étend sur 130 km, allant de Ouenza jusqu'à Houidjbet. Mission de défense de la frontière et de police. Un constat : la criminalité a sensiblement baissé depuis 2011, selon l'officier. La solution, préconise-t-il, est dans l'occupation permanente du terrain. Les regards restent, en revanche, rivés sur le mont en face et les suppositions sur la nature des menaces qui y ont pris leurs quartiers, mais dont les balises frontalières visibles sur des dizaines de mètres devraient servir d'indices de limite à ne pas dépasser. Explication sur le futur poste d'observation ! Un renfort en éléments humains, matériels, mais aussi en équipements comme les caméras thermiques qui vont scruter jour et nuit le tracé. Tous les postes de surveillance sont ainsi équipés. S'ajoute à ce dispositif une escadrille aérienne que le général Bousteïla a également inaugurée au niveau de l'escadron de la sécurité routière de Tébessa. Des hélicoptères déjà opérationnels et dont la mission est la surveillance du tracé sur toute sa longueur, de jour comme de nuit. Aïn Zerrouk, le poste avancé, nouvellement installé et équipé, a connu récemment sa première aventure. Les GGF installés au poste ont reçu des informations sur la présence de véhicules non identifiés en provenance de l'autre côté. Réaction immédiate des GGF qui surprennent les terroristes. Sept d'entre eux ont été éliminés. Un jeune élément posté raconte l'événement avec un naturel incroyable. Il est déjà habitué à ce genre de mission. La pluie a baissé d'intensité laissant apparaître quelques rayons brûlants de soleil. Une drôle de météo qui rappelle quand même celle qui marque la fin du mois d'août. La visite continue. Inspection du chantier du centre d'instruction. Les travaux sont à la traîne. Le commandant de la GN ne tient plus. Coup de colère. Coup de gueule. L'entrepreneur est lessivé. Traité de "saboteur", il est sommé d'assumer ses responsabilités. Le général-major Bousteïla s'en va illico. Constat presque identique au chantier du groupe d'intervention (GIR), il y passe à peine quelques secondes. Le coup est heureusement rattrapé au niveau de l'ESR où est installée l'escadrille aérienne qui n'attendait que son inauguration. "Opérationnelle", ont répondu les officiers. Il a eu une démonstration puisqu'il a effectué une partie de son ordre du jour par hélicoptère. Le soulagement se lisait dans les regards et les sourires des officiers. Pas des entrepreneurs qui ont disparu du paysage. De nouvelles mesures, a-t-on constaté sur place, sont prises depuis le début des événements en Tunisie et en Libye. Le dispositif sécuritaire a été adapté, amélioré et renforcé. Trois remparts assurent le contrôle, la surveillance et l'intervention à la frontière. Les postes avancés, les escadrons, les compagnies auxquels s'ajoutent les escadrons routiers, les SSI et les GIR qui ne font plus dans "l'ordre public". Car, explique un officier, il s'agit de faire face à une nouvelle menace. Cela d'autant que la contrebande s'est alliée avec le banditisme, le trafic de drogue et le terrorisme. Cela d'autant également, a-t-il ajouté, que les pays voisins n'ont pas les moyens et n'ont pas la maîtrise totale de leur territoire. Il s'agit donc, selon lui, d'éviter tout dérapage (sécuritaire) et risque d'infiltration en territoire algérien. D'ailleurs, le tracé de la wilaya de Tébessa a connu la mise en service de 16 nouveaux postes de surveillance. Le bilan illustre bien l'efficacité de ce dispositif. Pour les six mois de l'année 2014, les GGF ont saisi aux frontières, 24 armes, 10 000 balles, des grenades, une dizaine de bombes artisanales et conventionnelles, des roquettes, des lance-roquettes et une rampe de lancement de roquette sans compter des produits de la contrebande allant des véhicules aux produits alimentaires, vestimentaires et électroniques, du carburant, du cheptel, de la drogue et du rond à béton. La visite s'achève sous le soleil et les douleurs que provoque au corps "le foisonnement" des dos d'âne qui jalonnent toutes les voies menant à la ville de Tébessa. C'est à croire qu'elle a fait un jumelage avec Béjaïa, réputée pour ses ralentisseurs aussi inopportuns qu'insensés. D. B. Nom Adresse email