Maître Ali Yahia Abdenour, qui n'est plus à présenter, a abordé, hier matin au siège conjoint du Snapap et de la Laddh d'Oran, les questions de la transition politique, suite à l'initiative de la CNLTD, du rôle de l'Armée dans le système et le pouvoir en Algérie, la révision de la Constitution, le pouvoir économique, et ce, dans le cadre d'une conférence débat. "L'infatigable militant des droits de l'Homme", tel que présenté par Me Salah Debbouze, l'actuel président de la Laddh a développé son analyse de la situation politique en Algérie s'appuyant sur de nombreux repères historiques, et a souligné la nécessité "d'aller vers un changement du système, et non pas, comme certains le veulent, un changement dans le système". Pour Me Ali Yahia Abdenour, le système politique en Algérie n'a jamais changé depuis 1962 "Est-ce que ce système, il faut le faire évoluer ? Non. Il faut qu'il parte parce qu'il est basé sur la violence", répond-il. Rappelant les 1 000 milliards de dollars dépensés depuis l'Indépendance et les 623 milliards de dollars dépensés de 1999 à nos jours, il s'interroge encore : "Est-ce que, pour autant, l'Algérie est devenue un pays émergent, un pays développé ?" Il estime que non et il explique : "C'est un échec pour l'agriculture, pour l'industrie et, aujourd'hui, nos enfants meurent en mer." Me Ali Yahia voit là une conséquence de l'un des maux profonds de l'Algérie, la corruption alimentée par "une économie de bazar". Le président d'honneur de la Laddh fera le lien, alors, entre cette corruption qui ouvre toutes les portes en amont et qui est liée aux hommes de pouvoir, qu'il distingue des hommes d'Etat travaillant pour tout un pays. Ces hommes de pouvoir ne cherchent qu'à étendre leur pouvoir et à le garder par le biais de l'argent. Et de citer, à titre d'illustration, les cas Khalifa, Sonatrach et l'autoroute Est-Ouest. La nature du système, pour l'intervenant, est très claire : nous avons affaire à une "dictature", parce qu'il y a confusion des pouvoirs législatif et exécutif et absence de justice indépendante. Pire, il n'y a jamais eu d'élections libres depuis 1962. "Les Algériens ne sont pas plus de 15 à 18% à avoir voté en 2014", a-t-il martelé. Tout cela mènera Me Ali Yahia Abdenour à évoquer l'initiative de la Coordination pour la transition qui a organisé la conférence du 10 juin à laquelle il a participé. Il y voit un début de changement, grâce à la capacité des Algériens de différentes tendances à se regrouper et se respecter avec leurs divergences. Mais d'ores et déjà, pour l'orateur, un enjeu se pose pour cette coordination. Il est impératif, selon lui, que la CNLTD aille "vers le peuple" et qu'elle associe "les jeunes et les femmes", d'autant que cela aidera, estime-t-il, à éviter l'écueil des leaderships et l'ego des hommes politiques. M. Ali Yahia n'a pas manqué d'être critique envers Ahmed Ouyahia, chargé par le chef de l'Etat de conduire les discussions autour de la révision de la Constitution, dont il a rappelé le parcours de l'ex-patron du RND. Le FFS n'a pas été épargné par le militant des droits de l'Homme. "Le FFS n'est plus un parti de militants, mais un parti dirigé par des affairistes", a-t-il lâché. Et de déplorer, sur sa lancée, l'émergence d'affairistes qui ont "grandi avec l'appui des hommes de pouvoir et qui veulent, à leur tour, accaparer le pouvoir". Abordant le rôle de l'armée, Me Ali Yahia a d'abord rappelé que, de tout temps, c'est elle qui désigne et dégomme les Présidents, alors que sa mission est de "servir la nation, non un homme ou un clan". Car, ajoute-t-il, "il faut préserver l'armée des divisions". Il considère, toutefois, qu'aujourd'hui "les jeunes généraux ont la conscience politique suffisante, la formation et le niveau suffisants pour permettre à l'ANP de devenir une armée professionnelle qui sortirait de ce rôle de faiseur d'hommes de pouvoir". Me Ali Yahia Abdenour n'a pas manqué de demander aux présents parmi l'assistance de retenir les pistes de réflexion qu'il a exposées et de s'interroger à leur tour. Dans l'après-midi, il devait procéder à une vente de son dernier ouvrage. D. L Nom Adresse email