C'est un John Kerry sourire aux lèvres qui prend part à la conférence internationale sur l'Irak convoquée par le président français. Double satisfaction même. D'une part, les Etats-Unis se voient reconfirmés en tant que "maîtres" du monde, Barack Obama ayant réussi à organiser en un tour de main sa coalition contre l'islamisme du califat d'Abou Bakr al-Baghdadi, avec, cerise sur le gâteau, la participation de dix pays arabes, des rois et princes du Golfe et du Moyen-Orient ainsi que l'Egypte qui a obtenu le renvoi par le Qatar des Frères musulmans réfugiés dans cet émirat après le coup d'Etat fomenté en juillet 2013 par le général al-Sissi, maréchal-président, contre l'islamiste Mohamed Morsi. Le Caire, Amman, Djeddah se sont alignés en rang d'oignons. D'autre part, et pour marquer sa place de gendarme du monde, Obama a replacé la conférence de son homologue français dans son propre agenda. Façon de signifier en passant au locataire de l'Elysée que son agitation internationale n'avait de sens que sous le parapluie de la Maison Blanche. John Kerry a réussi le tour de force de faire dénoncer par l'Arabie saoudite l'idéologie propagée par les djihadistes du califat à cheval entre l'Irak et la Syrie et dont les interdits reposent sur le wahhabisme, fondement de la famille régnante à Ryad, comme il a obtenu la contribution de la prestigieuse institution de l'islam sunnite, Al-Azhar, dans la lutte contre l'islamisme. On est loin du temps où la grande maison cairote des fatwas s'était inscrite aux abonnés absents lorsque la population algérienne affrontait la barbarie des GIA, dont la ressemblance avec celle des djihadistes du califat du Levant accrédite l'idée qu'ils se sont abreuvés aux mêmes sources. Les cheikhs d'al-Azhar ont promis à John Kerry de faire la publicité de la coalition anti-islamiste dans les mosquées. La conférence sur l'Irak de Paris, en présence d'une vingtaine de pays, devra permettre à chacun de la vingtaine de pays présents d'être beaucoup plus précis sur ce qu'il peut ou veut faire sous le panache des Etats-Unis et de l'Otan. Mais l'ordre de frapper, où et à quel moment, dépendra du général américain à la retraite John Allen, ancien commandant des forces américaines en Afghanistan et homme-clé de la guerre en Irak, commandant en second du Centcom, le commandement américain chargé de la supervision des opérations dans tout le Moyen-Orient et l'Asie centrale, nommé vendredi par Obama à la tête de la coalition internationale contre le califat. Il sera assisté par Brett McGurk, le diplomate du département d'Etat chargé de l'Irak et de l'Iran. Comme quoi, le chef d'orchestre reste Washington. La France, dont le président François Hollande s'était rendu en fin de semaine en Irak et dans le Kurdistan où il a promis d'aider encore davantage militairement et humanitairement, devra ainsi se contenter comme ses pairs de l'Otan et les dix pays arabes ralliés à la coalition de supplétifs, la chair à canon dévolue à l'armée irakienne, aux milices chiites et aux peshmergas kurdes. Ravi d'avoir monté sa coalition, Barack Obama a cependant averti que l'éradication du califat ne va pas se faire du jour au lendemain, assurant qu'il avançait dans la bonne direction. "Nous allons affaiblir et, in fine, vaincre l'Etat islamique, en Irak et en Syrie", n'a-t-il cessé de proclamer depuis le sommet de l'Otan de la semaine dernière. Stopper les djihadistes est, certes, une priorité pour tout le monde, mais d'aucuns pensent que la "puissance" de l'organisation d'Abou Bak al-Baghdadi suscite à vrai dire des interrogations. Nom Adresse email