"On assiste depuis un mois au même engagement des populations aux côtés des forces de sécurité qu'au début de l'année 1995." La remarque est d'un vétéran de la lutte antiterroriste qui vient de reprendre du service. Pour essayer de comprendre ces nouveaux développements, un flash-back sur les derniers événements qu'à vécus l'Algérie est nécessaire. Fin août dernier, un groupuscule de dissidents d'Aqmi en Algérie annonce son allégeance à l'EI (Daech). Le 21 septembre, le guide alpiniste français, Hervé Gourdel, est kidnappé dans les montagnes de Bouira dans une zone faisant jonction avec trois autres wilayas, Tizi Ouzou, Boumerdès et Bordj Bou-Arréridj en l'occurrence. Le 24 septembre, le même groupe annonce et médiatise l'ignoble décapitation d'Hervé Gourdel. Un lâche assassinat qu'il avait pris pour un haut fait d'armes par lequel il cherchait à atteindre les esprits et réaliser une série d'objectifs. Sauf que, depuis, sur le terrain, dans les montagnes de la Grande-Kabylie, dans les Hauts-Plateaux et dans le Grand désert, et à la place de l'aura attendue, les groupes terroristes voient leurs éléments se neutraliser les uns après les autres. Partout en Algérie où une présence de groupes terroristes est suspectée, la traque est lancée par des forces de sécurité qui réalisent des opérations de qualité avec une efficience rarement constatée dans la lutte antiterroriste de par le monde. Cette réussite n'est pas le fruit du hasard. Loin des regards, un autre combat est mené au quotidien. C'est la guerre du renseignement que les terroristes en Algérie, qu'ils s'appellent Djound al-Khilafa ou GSPC, qu'ils soient une franchise d'Aqmi ou de Daech, viennent de perdre. En effet, la stratégie des groupes terroristes, depuis le début des années 2000, repose sur deux leviers. Pour le premier, ne jamais s'attaquer aux populations des villages avoisinants afin de bénéficier d'une omerta de fait. Pour le second, disposer en permanence de cellules de soutien et de logistiques qui font dans le renseignement, la logistique et la propagande. Une sorte de 2e et 5e bureaux clandestins. Le fait que Djound al-Khilafa s'est affilié à Daech, cette nouvelle multinationale terroriste, et le fait qu'un hôte de simples citoyens algériens, le guide alpiniste français Hervé Gourdel, soit assassiné par ces hordes, se sont traduits dans l'imaginaire algérien par une menace contre la souveraineté et la cohésion nationales. Aucun village, aucun douar et aucun hameau ne peut se permettre d'abriter dans ses coins, même les plus reculés, des professionnels de la mort au service de holdings terroristes qui se restructurent au gré des intérêts de puissances étrangères. Aujourd'hui, l'allégeance à Daech ainsi que la tragique liquidation d'un ressortissant étranger ont eu l'effet inverse. Le citoyen de l'Algérie profonde renoue avec le civisme, collabore avec les forces de sécurité et participe aux performances que ne cessent de réaliser ces derniers jours les militaires et les policiers engagés sur le terrain.