Ils étaient plusieurs centaines de policiers à marcher, hier, à Alger. Ils ont battu le pavé depuis El-Hamiz, pour tenir, en fin de parcours, un sit-in devant le Palais du gouvernement. Cette action de rue, inédite, des hommes à la tunique bleue vient, 24h après celle de leurs collègues à Ghardaïa. C'est vers 13h que la marche s'est ébranlée depuis le siège de leur unité à El-Hamiz. Dans une action silencieuse et surtout inédite, une centaine de policiers a décidé de rompre le silence et d'investir la rue à Alger pour dénoncer "leurs conditions de travail". Ces policiers, des éléments des Unités républicaines de sécurité, sont en colère contre leur hiérarchie. Ils exigent, en fait, le départ du DGSN, le général-major Abdelghani Hamel. "Nous voulons que Hamel parte", ont-ils dit après insistance des journalistes. "Nous, les éléments des unités d'intervention, sommes méprisés par nos responsables", dénonce un élément, avant qu'un autre n'abonde dans le même sens, en précisant qu'ils exigent de rencontrer le Premier ministre Abdelmalek Sellal, pour lui exposer les problèmes que vivent les policiers, notamment ceux des unités d'intervention. "Le rythme de travail est insupportable", se plaignent-ils, en mettant l'accent sur "les dangers" qui les guettent "lors des interventions". "Nous sommes sous-payés", ajoutent-ils, en rappelant que la venue de Hamel à la tête de la DGSN, après l'assassinat du défunt Ali Tounsi, "avait suscité des espoirs" dans les rangs de la police. En cours de route, les policiers "frondeurs" ont été applaudis. L'immense embouteillage créé par cette marche a permis à des centaines de citoyens "de saluer" l'action des policiers. Sous une pluie battante, et depuis El-Hamiz jusqu'à Belcourt, où un autre groupe rejoint les rangs des marcheurs, la discipline était le maître mot. Les marcheurs ont battu le pavé en file indienne, en prenant la précaution de se concentrer uniquement sur la bande d'arrêt d'urgence. Escortés par des véhicules de police, les marcheurs, en tenue, qui ne portaient ni casquette, ni arme, ni matraque, ont pris directement la destination du Palais du gouvernement. La voie dégagée, les contestataires étaient déterminés à se faire entendre. Sit-in au Palais du gouvernement Après plusieurs heures de marche, les policiers arrivent à hauteur du rond-point de Tafourah. Toujours la voie dégagée, des policiers en service tentent de les orienter. Au début, l'information qui circulait faisait état d'un sit-in devant le siège de la DGSN à Bab El-Oued. Coup de théâtre, la marche prend la direction du boulevard Amirouche. Là encore, les présents pensaient qu'ils allaient organiser une action devant le siège de la sûreté de wilaya. En vain. Ils ont pris la destination de la Grande-Poste et emprunté l'avenue Pasteur vers la rue du Dr Saâdane et rejoindre le Palais du gouvernement. Aucun dispositif de sécurité n'était mis en place, malgré la forte présence de la presse, des policiers en service et aussi des citoyens qui s'interrogeaient sur la finalité de cette action. Sur place, et devant le portail du palais resté fermé, les policiers ont formé un carré. Après avoir entonné un couplet de l'hymne national, suivi de "Tahya el-Djazaïr" et "Gloire à nos martyrs", un élément sort du groupe et engage une discussion en catimini avec un officier de police en civil. "Nous voulons rencontrer le ministre de l'Intérieur", a-t-il demandé. "Non, il n'est pas là, il est à Ghardaïa. Le SG vous attend", a répondu l'officier, avant que son interlocuteur ne décline l'offre en ajoutant qu'ils tenaient à rencontrer le ministre de l'Intérieur. Au moment de l'arrivée de la procession devant le Palais du gouvernement, Abdelkader Zoukh, wali d'Alger, sort du palais. Sans faire aucune déclaration, M. Zoukh a souligné qu'il est venu, seulement, "en tant que wali". À ce moment, le groupe de policiers lui tourne le dos, en signe de refus d'engager des pourparlers avec lui. Quelques instants après, les policiers décident de renvoyer la presse qui affluait vers le lieu, avant qu'un autre groupe ne vienne grossir les rangs des contestataires. Ce groupe serait venu de l'unité d'Hussein Dey. "El-Hamel dégage", était le mot d'ordre de ce groupe accueilli par les applaudissements de leurs collègues. 19h30, à l'heure où nous mettons sous presse, le sit-in était toujours maintenu. Les marcheurs auraient décidé de passer la nuit devant le Palais du gouvernement. M. M. Galerie Photos