La résolution, qui sera adoptée aujourd'hui, soumet les autorités algériennes à un code de bonne conduite, en contrepartie de la conclusion de l'accord. C'est aujourd'hui qu'une résolution législative portant sur la conclusion de l'accord d'association entre l'Algérie et l'Union européenne sera votée par le Parlement du même nom. Une résolution sans complaisance qui risque de ne pas plaire aux négociateurs algériens, tant elle se base sur un diagnostic tout aussi décapant sur la conduite des réformes politiques, économiques et sociales. “Condition, exigence et paradoxe”, sont autant de mots avec lesquels le Parlement des Quinze a bien voulu habiller sa résolution, histoire de ne pas donner un blanc-seign aux décideurs algériens. Il ressort, en effet, du texte dont Liberté a eu une copie, que l'UE n'est pas disposée à cautionner les errements politiques et économiques des dirigeants algériens, via la conclusion sans condition de l'accord d'association. Pays historiquement et géographiquement lié à l'Europe, l'Algérie ne se conçoit par nos partenaires que comme un pays stable politiquement mais surtout respectueux des droits de l'homme. En d'autres termes, les députés européens injectent une clause qui somme les autorités algériennes à se conformer aux règles de gouvernance, fondées sur la liberté et la démocratie. L'accord économique d'association, les droits de l'homme et la démocratie vont de paire d'après la vision des parlementaires. Or, le texte de résolution fait un constat plutôt négatif de la situation algérienne. Le paradoxe est relevé entre une opulence en terme de recette des hydrocarbures et un tableau de bord économique, social et politique des plus préoccupants. “Il est difficile de comprendre ce manque d'investissement dans un pays aussi riche en hydrocarbures”, note, en effet, le Parlement européen qui se fait le relais de la société civile algérienne qui parle de corruption et de mauvaise gestion. Sur le plan strictement politique, les députés de l'UE remarquent que “ni les tentatives de négociation entreprises (…) pour rétablir la paix, ni les initiatives comme la loi sur la concorde civile, ni les divers processus électoraux auxquels ont participé les islamistes n'ont pu rétablir la paix ni rouvrir totalement le champ politique”. Voilà un constat qui met à nu les limites du “w'iam” que Bouteflika voudrait ériger en doctrine politique. Toujours dans ce registre, l'UE remarque que “globalement, la conduite des forces armées au cours du conflit prolongé qu'a connu l'Algérie a été sévèrement critiquée par certains secteurs de l'opinion publique algérienne et de la communauté internationale”. Transition faite, la résolution reprend les déclarations des familles de disparus et des organisations faisant état de l'existence de 7 000 personnes et qui “détiennent des preuves d'une participation de la police et de l'armée”. Face à cette absence de lisibilité sur le double plan économique et politique, le Parlement européen ne veut point lâcher l'Algérie pour autant. “Pour des raisons d'ordre économique, social, culturel et historique, les liens sont étroits.” Ce faisant, “l'Union européenne a besoin de l'Algérie pour œuvrer conjointement à la création d'une zone de paix, de sécurité et de prospérité en Méditerranée”. De la même manière, souligne encore la résolution, l'Algérie a besoin de l'Europe pour “procéder aux réformes économiques indispensables, transformer et diversifier ses activités, créer de l'emploi, améliorer les conditions de vie et rétablir la paix sociale”. C'est pourquoi les Euro-députés concluent que “l'Algérie a besoin de l'aide de l'Europe dans des domaines aussi essentiels que la création des structures institutionnelles autonomes…” Cependant, le Parlement européen met un préalable : le respect des droits de l'homme et la démocratie. “Chose plus importante, nous devons savoir que l'accord d'association, qui établit un lien étroit entre la coopération économique, d'une part, et les garanties démocratiques ainsi que les droits de l'homme, d'autre part, inaugure une nouvelle phase dans les relations avec l'Algérie.” Décodé, ce message suggère que désormais rien ne sera plus comme avant entre l'Algérie et les Etats européens. “Sans ingérence, l'UE doit se montrer exigeante et efficace dans l'aide qu'elle apporte pour en finir avec le terrorisme et la violence.” En filigrane, on peut déduire que les pays de l'Union européenne soupçonne les autorités algériennes de détourner les aides militaires destinées à la lutte antiterroriste. Le propos est certes diplomatique mais renseigne assez clairement sur cette mise en garde. H. M.