M. Recep Tayyip Erdogan, chef du parti AKP au pouvoir depuis le 3 novembre, pourrait bientôt prendre les rênes du gouvernement turc. Il voudrait suivre ainsi Necmettin Erbakan, qui était chef du parti Refah et chef du gouvernement. Son parti de la justice et du développement (AKP) n'a pas attendu longtemps pour présenter au Parlement turc une panoplie d'amendements constitutionnels, lesquels amendements doivent permettre au leader de la formation politique issue d'une scission au sein de la mouvance islamiste de devenir Premier ministre. En raison d'une condamnation de 1998, Erdogan n'était pas éligible, il y a un mois, après une large victoire de son parti aux législatives, et n'a pu devenir chef du gouvernement. L'amendement introduit dans le projet prévoit une disposition qui ne prive du droit d'être élu que les personnes condamnées pour “terrorisme” et non pour “délit” politique, comme c'est le cas de Erdogan. Un second amendement attendu est lié à la convocation d'une élection partielle, après annulation par le haut conseil électoral de l'élection de trois parlementaires dans la circonscription de Siirt, dans le sud-est de la Turquie, à la suite d'une plainte de l'AKP. Il s'agit donc des modifications constitutionnelles qui permettraient au chef du parti islamiste de conquérir un siège parlementaire et devenir premier ministre. en fait, le parti AKP a réuni toutes les conditions de la réussite du référendum. D'autant qu'il détient 362 sièges au Parlement, à peine 5 sièges en dessous des 2/3 de la majorité nécessaire, comme stipulé dans la Constitution turque. Le parti au pouvoir a reçu, à cet effet, le soutien du Parti républicain du peuple (CHP, opposition) qui a promis de voter les amendements constitutionnels. Il faut dire que Tayyip Erdogan a le vent en poupe notamment suite à l'invitation qu'il a reçue de Bush pour se rendre aux Etats-Unis avant le sommet de l'Union Européenne qui se tient les 12 et 13 décembre. Les entretiens devront porter sur le soutien turc pour une éventuelle opération militaire américaine contre Bagdad. En contrepartie, Washington accorderait une aide à Ankara, avec la possibilité d'effacer la dette militaire qui s'élève à six milliards de dollars. Reste à savoir si cet islamiste Erdogan à la tête du gouvernement ira dans ses réformes jusqu'à être acculé à la démission par l'armée, comme cela s'est passé en 1997 avec Erbakan. R.H.