Lorsque la semaine dernière, l'APS avait annoncé l'élimination à Merouana (près de Batna) de Abdelwahab Ahmed Alouane, chef d'Al-Qaîda dans la région du Sahel et du Maghreb, la nouvelle n'a guère semblé emballer les Américains. S'exprimant sous couvert d'anonymat, un responsable de l'administration Bush avait émis des réserves sur cette information en affirmant qu' “elle n'est pas confirmée par une source indépendante (…), que si c'était vrai, Ahmed Alouane serait une figure importante d'Al-Qaîda mais pas un dirigeant”. Que vaut cette déclaration très soupçonneuse et méprisante de la prise révélée par les services de sécurité algériens face au soutien escompté par Washington de tous ses partenaires, de l'Algérie notamment, dans la traque des réseaux d'Al-Qaîda ? À chaque fois qu'il a reçu son homologue algérien, le président Bush a insisté sur cette précieuse aide pour venir à bout de l'organisation tentaculaire de Ben Laden. En visite en Algérie au début du mois de novembre dernier, son sous-secrétaire d'Etat aux affaires politiques, Marc Grossman s'était encore fait l'écho de cette sollicitation. À partir de demain, ce sera au tour de William Burns, secrétaire d'Etat adjoint, chargé du Proche-Orient, en tournée au Maghreb, de promouvoir l'importance d'une stratégie commune de lutte contre le terrorisme international. Ce déplacement, d'une durée de quatre jours, qui doit le conduire au Maroc, dans notre pays et en Tunisie, a été annoncé jeudi par un communiqué du département d'Etat. Monsieur Proche-Orient, William Burns, qui a tout récemment effectué une visite dans la région pour présenter “une feuille de route” du quartette ( Union européenne, Etats-Unis, Russie et Organisation des Nations unies), prévoyant unmode de règlement du conflit israélo-palestinien, doit consacrer une partie de ses entretiens avec ses hôtes à cette question. Il évoquera également avec eux le dossier irakien. Sur un autre plan, le programme USA – Afrique du Nord de partenariat économique figure au menu de cette visite. À Rabat, l'envoyé de la Maison-Blanche traitera avec les autorités marocaines de la perspective d'un accord de libre-échange. Il s'y enquerra par ailleurs, comme à Alger et Tunis, de l'évolution des réformes politiques et économiques. Cependant, il est certain, dans la conjoncture actuelle, que le sujet primordial qui focalisera les discussions aura trait au terrorisme, à “la campagne contre le terrorisme international et ses sources de financement”, a précisé jeudi l'un des porte-parole du ministère américain des Affaires étrangères. Contrairement aux assertions de ce responsable anonyme de son administration, Bush doit certainement apprécier tous les efforts entrepris par l'Algérie et ses voisins dans la lutte contre le terrorisme. D'ailleurs, en guise de soutien à cette offensive, son pays vient pour la énième fois de répertorier le GIA et le GSPC sur la liste rouge des mouvements subversifs. C'est au lendemain du double attentat du 11 septembre que les Etats- Unis avaient arraché l'Algérie à son combat solitaire contre les groupes armés locaux en s'associant à leur traque dans le monde et en s'attaquant à leurs sources de financement. À son instar, la Grande-Bretagne, qui avait pendant longtemps servi de base arrière au terrorisme international, a pris l'engagement de réviser ses lois en faisant montre de fermeté à l'égard des ressortissants étrangers et d'une hospitalité plus sélective. Un haut responsable du gouvernement Blair avait, il y a deux ans, effectué une visite à Alger pour faire écho de ce changement de ton. La France, instruite par les attentats du RER de 1995, avait, bien avant ses partenaires, saisi l'importance d'une lutte commune. Cette stratégie de groupe, ensuite imposée par le drame du mardi noir et renforcée par les menaces continuelles de Ben Laden, est devenue incontournable. Il y a quelques jours, la police parisienne a arrêté sur son territoire quatre éléments du GSPC en cavale. À l'approche des fêtes de fin d'année, la vigilance s'est renforcée outre-Méditerranée et outre-Atlantique pour prévenir les nouvelles menaces du chef d'Al-Qaîda. Aussi, la contribution de tous les pays, ceux du Maghreb notamment, est-elle la bienvenue. C'est à cette fin et dans le cadre d'une stratégie à long terme que Paris à l'instar de Washington a décidé d'un travail commun avec ses voisins de la rive sud. En visite à Rabat lundi dernier, le président français, Jacques Chirac, a évoqué avec le roi Mohamed VI, le développement d'un partenariat stratégique d'exception entre les deux pays. En 2003, il sera l'hôte d'Alger. En attendant, ce sont ses ministres des Affaires étrangères et de l'Intérieur qui sont attendus dans les prochaines semaines dans notre pays. Au programme de leur séjour, la coopération des services de police, l'échange de renseignements sur les groupes terroristes figurent en ligne de mire. S. L.