L'Algérie et la France s'acheminent vers la signature, en automne prochain, d'un accord-cadre de défense “ambitieux”. “Cinq heures d'entretien”, titre le très officiel quotidien El Moudjahid à propos des entretiens entre le président Abdelaziz Bouteflika et la ministre française de la Défense, Michèle Alliot-Marie, que la presse de l'Hexagone appelle “affectueusement” Mam. Au-delà de la durée qui suggère au demeurant, dans la conception officielle, l'importance des entretiens, peu de choses ou presque ont été dites sur la teneur de ces discussions. Dans sa déclaration au sortir de l'audience, la représentante du gouvernement français s'est seulement contentée d'affirmer que “(nous) avons fait un vaste tour d'horizon sur les relations en matière de défense, des relations bilatérales et de la défense européenne”. Un discours, convenons-en, qui emprunte parfaitement au jargon diplomatique. Pourtant, à se fier à des sources crédibles, beaucoup de questions ont été évoquées au cours de ces discussions. Et la plus importante, sans doute, est celle inhérente à la signature d'un “accord-cadre” de défense que les Français souhaitent signer dès l'automne prochain même si sa préparation nécessite un gros travail en amont. À ce sujet, la partie algérienne s'est prononcée en faveur d'un accord “ambitieux” eu égard au rang de “partenaire privilégié” dont jouit l'Algérie auprès de la France. À la demande de l'Algérie d'obtenir des “choses tangibles et concrètes”, la ministre française a rassuré que son pays ne s'engagerait pas dans des promesses qu'il ne pourrait pas honorer. Dans le cadre de cet accord-cadre, il est question de consolider la formation d'officiers et de sous-officiers algériens en France et aussi d'envisager des exercices militaires communs. Cet aspect est toutefois subordonné à l'élaboration d'un cadre juridique sur la défense des armées qui n'existe pas encore. Les premiers exercices communs peuvent concerner le corps de la Marine dans les deux pays. Il ne faut pas les attendre immédiatement après la signature de cet accord susceptible d'intervenir dès l'automne. Ces exercices nécessitent de part et d'autre une préparation longue et minutieuse qui peut aller jusqu'à deux années. En attendant, les navires de guerre pourraient être autorisés à faire escale en Algérie. Lors de cette visite historique d'un ministre français de la Défense en Algérie, le sujet du terrorisme, considéré par Michèle Alliot-Marie comme l'ennemi numéro 1 de la communauté internationale, a été évoqué sous ses différents aspects. Les deux parties ont parlé des causes historiques et sociales de ce fléau, de ses sources de financement et des moyens de son endiguement. À ce sujet, l'Algérie aurait émis le souhait d'acquérir des hélicoptères et des images satellitaires pouvant permettre aux forces de sécurité de localiser les groupes armés qui poursuivent leurs activités sur le territoire national. C'est la seule demande qui semble pressante même si l'Algérie a besoin de rénover en grande partie ses équipements militaires, vieillis en raison de l'embargo de fait qui lui a été imposé au cours de la dernière décennie. La rénovation des équipements est en liaison avec le projet plus large de la professionnalisation de l'armée. La France s'y est déjà engagée avec la suppression depuis quelques années du service militaire et le redéploiement des effectifs de police et de gendarmerie. La question des équipements est désormais évoquée sans complexe. On se souvient qu'en 1993, la fourniture de quelques hélicoptères de type Ecureuil, même dépourvus des équipements de vision nocturne, avait soulevé un tollé dans certains milieux politiques algériens et français qui n'y voyaient que des instruments de répression de l'opposition politique. C'est la preuve que les temps ont changé et que l'Algérie est reconnue en droit de se défendre légitimement contre le terrorisme. Une position qui va lui permettre de retrouver force et solidité sur la scène internationale. Une démonstration peut être apportée très prochainement avec la rencontre envisagée avant la fin de l'année des ministres de la Défense des “4+3”, c'est-à-dire quatre pays de la rive nord de la Méditerranée (l'Espagne, la France, l'Italie et le Portugal) et les trois pays du Maghreb (l'Algérie, le Maroc et Tunisie). K. K. et N. S.