Pour lui, il s'agit surtout d'un geste à l'égard de son parti, le Likoud, fermement opposé à son plan de retrait de Gaza. Ariel Sharon accélère sa politique de colonisation en Cisjordanie, avec l'accord tacite de l'administration américaine. Pour le premier ministre israélien, au-delà de ses profondes convictions à propos de la question palestinienne, il s'agit là d'un geste à l'égard de son parti, le Likoud, fermement opposé à son plan de retrait de Gaza. Bush, lui, l'attitude conciliante, obéit à des considérations électorales. Les républicains n'ont jamais contrarié Israël et le locataire de la Maison-Blanche doit veiller à ne pas déplaire au puissant lobby juif américain pour ne pas s'aliéner un électorat qui pourrait d'autant faire la différence le 2 novembre prochain que le candidat démocrate John Kerry paraît prendre de l'avance dans la course aux présidentielles. Sharon, qui s'est assuré du soutien des travaillistes pour parer à toute défection de la part de ses traditionnels soutiens et sympathisants, a donné son feu vert pour la construction de 301 logements dans deux colonies situées en Cisjordanie près d'El-Qods. À l'intérieur du mur que, pourtant, la cour suprême israélienne avait remis en cause du moins dans cette partie d'El-Qods. Ces terres, Israël se les a appropriées après 1967, en violation de centaines de résolutions onusiennes ne reconnaissant que la ligne verte établie en 1948 comme ligne de séparation entre Israël et la Palestine. La semaine dernière, Sharon avait déjà donné son feu vert à des appels d'offres pour 1 001 autres logements en Cisjordanie. Au total, 2 167 permis de construire ont été délivrés ou sont sur le point de l'être cette année, alors que 908 logements dans les colonies de Cisjordanie ont été commercialisés en 2003, 647 en 2002 et 917 en 2001. L'annonce de la construction de 301 logements est intervenue quelques jours après qu'un responsable américain, cité par le New York Times, eut fait état d'un changement de politique des Etats-Unis, qui admettraient désormais des constructions dans les colonies pour répondre à la “croissance naturelle” de la population des colons. La politique officielle américaine est à présent de s'accommoder ouvertement de celle de Sharon. Pour la presse israélienne, Washington est en harmonie avec Tel-Aviv. Une caricature du quotidien israélien Haaretz illustre ce changement de la politique américaine en montrant un couple de colons au lit, l'époux chuchotant à sa femme : “nous avons la permission pour une croissance naturelle.” “Pas ce soir, chéri”, lui répond sa femme, visiblement fatiguée. La semaine dernière, les membres de la convention du Likoud ont désavoué Sharon en votant contre l'entrée de l'opposition travailliste au gouvernement. Ce ralliement aurait permis à Sharon de disposer d'une coalition pour faire adopter son plan, alors qu'il ne dispose plus d'une majorité parlementaire. Sharon affirme qu'en contrepartie de l'évacuation de la bande de Gaza et des 8 000 colons qui y vivent, il va renforcer l'emprise d'Israël sur les grandes colonies de Cisjordanie, où vivent la grande majorité des 240 000 colons. En avril dernier déjà, le président américain Bush avait fait un geste envers Sharon en soutenant son plan et en affirmant pour la première fois qu'un règlement de paix devra prendre en compte les réalités démographiques, laissant entendre que les Etats-Unis acceptaient l'idée du maintien en place des principales colonies. Les palestiniens ont dénoncé avec virulence, ces derniers jours, cette prise de position de l'administration américaine qui va se traduire, selon eux, par l'annexion de territoires en Cisjordanie. Au sein de la ligue arabe, c'est le silence sidéral ! D. B.