Les raisons qui ont poussé le parti, pourtant membre de l'alliance présidentielle, à déclencher une véritable croisade contre ces amendements, suscitent l'interrogation. Le fait mérite sans doute d'être relevé : depuis quelques semaines, des divergences entre les partis de la coalition gouvernementale sont étalées sur la place publique. À l'origine des malentendus, on l'aura sans doute constaté, le fameux code de la famille. Entre la formation d'Abou Djerra Soltani, attachée à la version originelle du texte, et un RND favorable aux amendements, le consensus est loin d'être établi. Même si ces malentendus s'apparentent à une différence d'approche autour d'un texte qui, du reste, a été adopté en Conseil de gouvernement où siègent les “deux compagnons de fortune”, il n'en demeure pas moins qu'à la longue, ils peuvent révéler une guerre feutrée dont on ne peut saisir aujourd'hui les contours de l'enjeu. D'aucuns, en effet, s'interrogent sur cette subite frénésie qui s'est emparée du MSP. Partie prenante de la coalition, la formation islamiste a, dès le mois d'août dernier, déclenché une véritable “croisade” contre les amendements du code de la famille. Parallèlement à la proposition de référendum, elle a multiplié les sorties pour fustiger un texte, à ses yeux d'inspiration laïque. Appuyé pour la circonstance par le MRN — un parti dont à la limite on peut concéder l'hostilité, d'abord pour sa vision obscurantiste du modèle de société et ensuite pour son éloignement du gouvernement — le MSP est allé même jusqu'à laisser planer la menace d'un retrait de l'exécutif. À cette question pourtant, les responsables du MSP tentent de faire la part des choses. “L'alliance présidentielle est au-dessus du code de la famille qui est loin d'être un projet politique. L'alliance n'est pas menacée. Nous ne comptons nullement nous retirer. Nous ne sommes pas pressés de rompre et nous n'avons aucun intérêt à le faire”, disait l'autre jour, lors d'un rassemblement à Alger, Abou Djerra Soltani. Dès lors, l'on ne peut s'empêcher de s'interroger sur les motivations réelles de cette formation politique. S'agit-il de simples gesticulations destinées à une consommation interne au parti, en ce sens que l'on tente de mobiliser une base désabusée après les échecs électoraux de 2002 ou alors obéissent-elles à d'autres considérations ? En tout cas, aux yeux de nombreux observateurs, elles traduisent un véritable malaise au sein de la coalition d'autant qu'elles interviennent au moment où des rumeurs insistantes font état d'un éventuel départ d'Ahmed Ouyahia de la tête de l'Exécutif. Vu sous cet angle, il n'est pas exclu donc que les manœuvres du MSP, un parti dont la proximité avec certains cercles décideurs est de notoriété publique, ne visent qu'à déstabiliser l'Exécutif. Et Amara Benyounès, SG du nouveau venu sur la scène politique, l'UDR, y voit déjà les prémices d'un éclatement de la coalition. “Le conseil national suit avec attention les convulsions qui ébranlent l'alliance présidentielle et leur développement”, soutient-il. Mais en tout état cause, le spectacle qui nous est offert par les partis de la coalition révèle le caractère hybride d'une entité que rien, en vérité, ne réunit hormis le magique attrait du pouvoir. K. K.