“Mon dernier cadeau à ma famille —celle de la presse —, c'est de lui ouvrir mon domicile pour abriter la Maison des libertés.” Voilà, la dernière volonté d'un homme qui a consacré sa vie à la Révolution et à la défense de la liberté d'expression. Du haut de ses 80 ans, le regretté moudjahid, M'hammed Yazid, a consenti un ultime don à la profession qu'il chérissait par-dessus tout : la presse. C'était en 2002, une année avant qu'il ne meure, debout dans son domicile, public, à la veille de la célébration du 1er Novembre. En ce 50e anniversaire du déclenchement de la guerre de libération, un vibrant hommage doit être rendu à l'icône du journalisme révolutionnaire que fut Si Yazid. À ce véritable maquisard de la plume qui a fait de ce métier un sacerdoce jusqu'à la fin de ses jours. Exhumer, aujourd'hui, la mémoire de cet infatigable monument de l'information est une manière bien modeste de lui rendre son beau cadeau laissé à une corporation qui en a grandement besoin. “Il n'est nullement exagéré d'affirmer que le défunt M'hammed Yazid était le fondateur de l'information de la Révolution et que l'information pour lui n'était pas seulement un métier, mais un mode de vie…” Cette reconnaissance du président Bouteflika dont il n'avait pourtant cessé de brocarder la gestion des affaires de l'Etat, prouve, si besoin est, que cet homme fait réellement consensus. Ses éclairages dans les quotidiens nationaux, sur les questions des libertés et de l'information, sont autant de cours magistraux destinés au jeunes journalistes pour qu'ils s'abreuvent des subtilités du métier et de la conduite à tenir dans un environnement polico-médiatique où la manipulation a été érigée en pratique journalistique. Ses innombrables coups de gueule furent également autant de mises en garde aux autorités trop souvent enclines à rogner sur les espaces de liberté, a fortiori celui de la presse. Incontestablement, M'hammed Yazid restera pour la postérité l'une des rares figures de la Révolution qui a su “s'adapter” avec la mentalité de la génération d'après 1962 et, mieux encore, à l'aider à conquérir sa liberté. Ses lointaines pérégrinations, aux quatre coins du monde en tant que représentant du FLN puis comme diplomate, ne lui ont pas donné la grosse tête. Bien au contraire. l'Homme est resté humble au milieu des humbles. L'amour ineffable qu'il voua à l'information, lui qui a côtoyé et forcé le respect des journalistes du Washington Post et du New York Times, a fait de lui “un vrai ami” de la presse nationale comme il se plaisait à nous le dire. M'hammed Yazid est une vie dédiée à la presse. Sans doute. malade et marchant à tâtons, Si Yazid traînait difficilement sa longue silhouette dans les différentes rédactions de la presse nationale pour y passer des moments de plaisir au milieu des siens. “L'électron libre” comme il aimait se définir, a mené un long combat pour la protection de la liberté de la presse. À commencer par ses écrits au début des années cinquante dans les colonnes de “l'Algérie libre”, en passant par sa gestion du département de l'information au sein du Gouvernement provisoire de la Révolution en 1958, pour finir comme autorité morale respectée de la jeune presse privée nationale. Par son parcours sans égal et son engagement franc pour la liberté, M'hammed Yazid rejoint de facto le panthéon de tous ceux et celles qui ont donné leur vie à la liberté de la presse pour que vive l'Algérie libre, heureuse et démocratique. H. M.