En décembre 1999, il y avait un discours officiel orienté vers la relance de l'économie par la stimulation de l'offre en s'appuyant sur la privatisation et les investissements directs étrangers. C'est un discours plus idéaliste que réaliste pour au moins deux raisons. La première est qu'il met la balle dans le camp des investisseurs potentiels et non à l'initiative du gouvernement. La seconde est que les conditions d'accueil et d'absorption rapide des investissements directs étrangers n'étaient pas réunies en dehors du secteur des hydrocarbures. Il n'y avait ni Fonds d'investissement spécialisé, ni banques d'affaires, ni administration préparée à ce type d'activité, ni responsables disposant d'une crédibilité auprès des opérateurs économiques et d'une visibilité quant à l'orientation économique. Par ailleurs, nous travaillions dans un environnement international marqué par l'accélération des changements qui offrent des opportunités jamais égalées, auparavant, pour ceux qui prennent le train de la Révolution Technologique mais qui creusent l'écart entre ceux qui sont dans le train et ceux qui restent sur le quai. La nature de la dotation en ressources humaines et matérielles de l'Algérie se présente comme une contrainte qu'il est possible de transformer en opportunité, à condition de mobiliser l'ensemble des acteurs de la vie économique et sociale. D'où la difficulté et la complexité de la conduite des réformes. Face à une telle complexité, il y avait trois types de comportements possibles : (I) le fatalisme selon lequel on ne peut rien faire (ou presque), (II) le complexe du persécuté qui consiste à mettre la faute sur les autres et sur “le reste du monde”, (III) la hiérarchisation des priorités. C'est la hiérarchisation des priorités qui a été retenue comme méthode de travail, en réalisant le peu de ce qui est possible de faire tout de suite, en lançant des études spécifiques pour apporter des solutions sectorielles et en lançant des études à long terme pour définir une stratégie globale de sortie de crise. Dans le cadre de ce qui peut être fait immédiatement, l'amélioration des prix du pétrole a permis d'initier une Loi de Finances Complémentaire avec quatre axes principaux. 1. Des dotations budgétaires supplémentaires pour améliorer les conditions de vie des populations par les Programmes Sectoriels Décentralisés (PSD) et les Plans Communaux de Développement (PCD), les cantines scolaires et les hôpitaux, le logement social et l'allégement des dettes des communes. L'expérience de mise en œuvre de la Loi de Finances Complémentaire devait permettre à la Loi de Finances 2001 d'aller plus loin dans le processus amorcé, notamment la relance des projets à l'arrêt au niveau des PSD et PCD. Il y a lieu de rappeler que les PSD s'adressent à l'hydraulique, les infrastructures de base (routes, ponts), les infrastructures administratives, I'éducation, la santé, la jeunesse et les sports… Les PCD s'adressent quant à eux à la satisfaction des besoins prioritaires de la population : adduction en eau potable (AEP), assainissement, désenclavement, amélioration du cadre de vie. 2. Le deuxième axe consistait à régler la question de la contre partie Dinar des dons et prêts extérieurs pour les rendre plus facilement mobilisables. 3. Le troisième s'adressait à la gestion de la dette publique en créant un Fonds de Régulation. 4. Le quatrième concernait le démarrage effectif du Fonds Spécial de Développement du Sud. Il a également été procédé au lancement des travaux de maintenance de la Faculté Centrale d'Alger, à la préparation du démarrage des Classes Préparatoires aux Grandes Ecoles, ainsi que des actions spécifiques dans le cadre des visites de terrain dans les wilayate. Dans le cadre de ce qui peut être fait sur le plan sectoriel, il y avait le dossier de la gestion des capitaux marchands avec la restructuration des Holdings. Là également, il y avait une position officielle arrêtée sur le devenir des Holdings : leur disparition. Mais il n'y avait pas de réponse prête à la question ordinaire: quelle solution de rechange ? En attendant la réponse à cette question qui n'est pas venue, la recherche de solution a été engagée. Le timing, la séquentialité, la rapidité, la crédibilité et la visibilité sont les éléments de base du succès du programme de réhabilitation. C'est ce qui a justifié¦é la décision prise de réduire le nombre des holdings de onze à cinq et de confier la direction de chacun d'eux à un Directeur Général unique au lieu et place d'un Directoire. La mission de ces holdings est de liquider les actifs dormants et de réhabiliter le potentiel productif par le partenariat ou la privatisation. Bien sûr, la privatisation n'était pas vue comme un slogan pour asseoir l'image d'un responsable à l'étranger, mais comme un moyen d'accroître la richesse de la Nation par la productivité et la compétitivité, instruments privilégiés pour sortir de l'économie de rente et construire une économie compétitive. Dans le même cadre, il y avait l'initiation d'une loi sur le logement social et une autre sur les Postes et Télécommunications, de même que des travaux lancés par la Présidence de la République sur la réforme de la justice et la réforme de l'éducation. Des travaux sur l'efficacité du système d'aide à l'emploi, sur le développement de la formation en gestion, sur les banques d'investissement et le dossier de l'eau, étaient lancés. Dans le cadre des études à long terme, un travail a été initié avec 22 Docteurs universitaires pour répondre à la question suivante : quels sont vos points de vue sur l'Algérie en 2020 ? Par ailleurs, l'expérience de gestion des dossiers durant cette période et l'amélioration persistante de la situation financière de l'économie ont alors permis de concevoir un programme global appelé Programme pour la Relance de l'Economie. Toutes les conditions d'équilibres financiers nécessaires à la relance étant réunies, il était possible de définir et de mettre en œuvre la stratégie de relance de l'économie en deux directions. A court terme, la relance est assurée par la stimulation de la demande globale quantitativement et qualitativement. Quantitativement, en augmentant les dotations budgétaires destinées aux investissements dans le budget d'équipement. Qualitativement, en orientant ces investissements vers les secteurs qui améliorent les conditions de vie des populations par la disponibilité d'infrastructures, l'emploi et le revenu. A long terme, la relance sera assurée par la stimulation de l'offre, grâce à la réhabilitation du secteur productif et les investissements afin d'accroître la compétitivité de l'économie nationale et assurer la réussite de son insertion dans l'économie mondiale, plus particulièrement' son adhésion à l'O.M.C. et son entrée dans une zone de libre échange avec l'Union Européenne. Ce programme a été adressé à la Présidence de la République le 19 août 2000, soit une semaine avant de quitter le gouvernement. Ce qui est perceptible, deux ans plus tard, c'est que l'aspect relance par la demande s'est contenté de dotations budgétaires supplémentaires. L'approche quantitative a pris le dessus sur celle qualitative. En ce qui concerne le relais de l'offre, il reste prisonnier de la bureaucratie comme en témoigne le piétinement du dossier des cap¦taux marchands et le manque de visibilité persistant quant aux choix économiques. A jeudi prochain pour une autre question ; entre-temps, travaillons tous et toutes à l'élargissement de la base du dialogue sur l'avenir de l'Algérie.