Le projet, pour le moins flou, de la révision de la Constitution, cher au président Abdelaziz Bouteflika, scinde, tant sur la forme que sur le fond, la classe politique en deux pôles. Il y a, d'une part, les partis politiques et les personnalités proches du cercle présidentiel, lesquels soutiennent toutes les actions du chef de l'Etat, y compris donc cette révision constitutionnelle, et de l'autre, l'opposition qui, dans son ensemble, milite pour que cette révision soit précédée par l'organisation d'une présidentielle anticipée. C'est la revendication, notamment, de la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratiques (Cnltd), incarnée par six partis d'opposition (MSP, RCD, Jil Jadid, El-Islah, Ennahda et FJD), ainsi que l'ancien chef de gouvernement, Ahmed Benbitour. À l'opposé, le FLN dont le président "d'honneur" n'est autre qu'Abdelaziz Bouteflika, lui, défend naturellement le principe d'une révision du texte de la Constitution comme souhaité par le chef de l'Etat et s'oppose catégoriquement à l'idée d'une présidentielle anticipée. Saïd Bouhadja va plus loin. Le chargé de communication du FLN, contacté par Liberté, avance que l'idée d'une présidentielle anticipée émanerait à "80% du Qatar" ! "Ceux qui réclament une présidentielle anticipée puisent leur pensée d'ailleurs ; c'est une pensée qui est à 20% d'ici et à 80% du Qatar !", accuse le porte-parole du FLN pour qui, la révision de la Constitution a des objectifs nobles. Les "amendements profonds" envisagés visent à redéfinir les missions des institutions et à rééquilibrer leurs prérogatives, selon lui. Dans sa plateforme politique, la Cnltd insiste sur la nécessité d'installer au préalable un organisme indépendant pour l'organisation et la gestion des élections aux fins de réussir une présidentielle anticipée, et le président qui sera "légitimement" élu aura, ensuite, la tâche de procéder à une révision consensuelle de la Constitution. Ce sont les principales propositions réitérées, hier, par Abderrazak Makri, président du MSP, qui qualifie la démarche de la Cntld de "geste de bonne intention" avec, pour seul objectif, de sortir le pays de la crise institutionnelle et politique le laminant depuis des années. Contacté par téléphone, M. Makri explique que la révision constitutionnelle, telle que voulue par le chef de l'Etat, est loin d'être consensuelle tant que, regrette-t-il, seuls les partis politiques et les organisations proches du pouvoir sont concernés par les dernières consultations menées par le chef de cabinet de la présidence, Ahmed Ouyahia. Or, souhaite-t-il, une Constitution consensuelle exige une large participation de l'ensemble de la classe politique et toutes les composantes de la société. M. Makri déplore ainsi la stratégie adoptée par le pouvoir en place dont la volonté est aux antipodes d'une démarche démocratique, encore moins de consensus national. Une idée que partage Ali Benflis, chef du Pôle des forces du changement, pour qui "cette énième révision n'a pas pour but de répondre aux graves problèmes qui frappent l'Algérie". Dans sa déclaration faite avant-hier à l'occasion d'une conférence organisée à Oran par le parti El-Fajr El-Jadid, M. Benflis avait rappelé que "le pôle d'opposition auquel appartient (son) parti n'est pas dans l'optique d'un processus de construction d'un camp contre un autre, nous partageons les aspirations de ce qui est bon pour notre peuple et la prospérité de notre nation. Nous prônons le dialogue pour parvenir à un consensus national avec un objectif commun : sortir le pays de sa crise". F. A.