La protestation contre le gaz de schiste se poursuit toujours à In-Salah. Le décor et les scènes sont presque identiques depuis le 1er janvier dernier : marche matinale, ville morte et rassemblement permanent sur la place de la Résistance qui fait face au siège de la daïra. La visite très spéciale, effectuée avant-hier, par le DGSN, le général-major, Abdelghani Hamel, même si elle a été bien accueillie par les protestataires, n'a pas, pour autant, suffi à contenir la colère des citoyens farouchement opposés au projet d'exploration du gaz de schiste. Hier, au 20e jour du mouvement de protestation contre cette alternative énergétique, la mobilisation citoyenne est intacte. Une marche populaire a été organisée durant la matinée drainant une foule nombreuse, dont femmes et hommes, tous âges confondus, estimée au minimum à 2 000 personnes. Les mêmes slogans ont été scandés, à l'occasion, par les manifestants qui tiennent au caractère pacifique du mouvement. "Non au gaz de schiste" est le slogan revendication qui est répété, presque du début jusqu'à la fin de la marche. Il est souvent suivi de prières originales dont seuls les sages de la région sont en mesure de vous en dire le sens. Cela fait déjà plusieurs jours que ces derniers ont choisi ce procédé pour parer au silence observé par des pouvoirs publics. "Ya latif eltof bina", "Ya latif ya settar men el-ghaz essakhri estorna" (Ô Dieu Le Clément, protège-nous du gaz de schiste), telles sont les phrases reprises en chœur par les citoyens d'In-Salah à l'occasion de leur prière dite "El-Lotfia". Le dispositif de sécurité renforcé ne fait qu'observer les marches et les rassemblements pacifiques des citoyens. Il faut dire qu'aucun débordement ou dérapage, même verbal, n'a été commis par les manifestants d'In-Salah qui, comme un seul homme, depuis le début de leur mouvement, n'ont pas répondu à la provocation et aux tentatives de récupération politicienne. Pendant ce temps, les négociations entre les représentants des citoyens et les autorités, menées souvent avec l'aide de quelques intermédiaires, n'ont jamais cessé. La spéculation aussi. La nature ayant horreur du vide, radio-trottoir alimente souvent les rumeurs les plus folles en l'absence d'une communication gouvernementale sur le sujet. Les partis politiques et les médias publics "vomis" par les manifestants Néanmoins, les leaders du mouvement, plus que jamais vigilants, ne manquent pas d'éclairer, chaque fois qu'il est nécessaire, la lanterne des citoyens en rendant constamment publique la moindre information officielle qui leur parvient. Pour ce faire, les membres du collectif citoyen s'adressent, plusieurs fois par jour, à l'aide d'un mégaphone, aux occupants de la place de la Résistance. Ils ne manquent pas d'appeler, à chaque fois, les citoyens "à rester très attentifs et vigilants face aux récurrentes tentatives de récupération politicienne". "Attention ! Il y a beaucoup de partis politiques qui vont essayer de vous approcher avec l'espoir de récupérer notre mouvement. Evitez-les, SVP. Aujourd'hui, nous avons eu l'information que des représentants d'un parti politique comptent venir ici ; nous leur disons que nous n'avons surtout pas besoin de les voir", a lancé au mégaphone, Mohamed Azzaoui, un des membres du collectif citoyen antigaz de schiste, faisant allusion à une délégation du FLN, qu'il n'a pas nommée et dont la venue depuis Tamanrasset, avait été annoncée la veille. Cette délégation que devait mener un député très contesté à In-Salah, apprend-on de source bien informée, a dû annuler sa venue probablement sur conseils des services de sécurité, et ce, afin d'éviter d'envenimer la situation. Outre les partis politiques, les médias publics dont les représentants de la Radio nationale, sont arrivés hier à In-Salah, sont l'autre cible des manifestants. "Où étiez-vous durant les 20 jours qu'aura duré notre mouvement ? SVP, partez d'ici car on n'a pas besoin de vous", tel est le message d'"accueil" réservé par les manifestants à nos confrères des médias publics qui n'ont pas couvert l'événement jusque-là. F. A.