L'ère du grand gaspillage d'énergie L'Algérie célèbre l'anniversaire de la nationalisation des hydrocarbures. La veille, le ministre de l'énergie annonçait la création d'un observatoire de prospection du gaz de schiste où est représentée la société civile. Une initiative pour mettre fin au mouvement de protestation. Comment sera-t-elle accueillie par les opposants à l'exploration et l'exploitation du gaz de schiste ? On aura une réponse dans les prochains jours. Le ministre de l'énergie souligne également que, 44 ans après les nationalisations, les réserves d'hydrocarbures sont en légère hausse. C'est comme si on n'avait consommé aucune goutte d'huile et aucun mètre cube de gaz depuis quatre décennies. Revers de la médaille, Youcef Yousfi annonce la révision du programme des énergies renouvelables lancé en 2011. Un signe que peu de progrès ont été réalisés dans ce domaine. Les énergies fossiles, pétrole et gaz, constituent toujours la quasi-totalité de notre bilan énergétique. De surcroît, le nouveau plan mise sur le solaire photovoltaïque. Or, cette filière, pour des experts, consomme trop de foncier, pose des problèmes de maintenance et assure une autonomie de moins de cent jours. Elle est de surcroît coûteuse. La filière centrales hybrides présente plus d'avantages. En fait, les avis des experts ne sont pas tombés dans l'oreille de nos responsables, d'où un programme des énergies renouvelables qui bat de l'aile. Signe d'une politique énergétique menée sans large concertation avec les experts, les chercheurs, les professionnels du secteur et les opérateurs publics et privés. Deux acteurs non négligeables dans la cohérence de cette stratégie sont mis en veilleuse : la Commission de régulation électricité et gaz (CREG) et l'Agence de régulation des hydrocarbures (ARH) qui est censée contrôler si Sonatrach respecte dans le forage des puits de gaz de schiste la réglementation en termes de préservation de l'environnement. Ces divergences sur l'option énergies renouvelables ont été également abordées par la rencontre sur la transition énergétique organisée samedi dernier par le Club énergie de l'association des anciens diplômés de l'Institut algérien du pétrole. L'une des conclusions de ce conclave est que l'Algérie prépare mal sa transition énergétique. On n'a pas bien posé les jalons de ce processus qui consiste à passer d'un mode de production énergétique carboné à un mode moins carboné. Qu'il s'agisse de l'efficacité énergétique, du renouvelable, les progrès sont timides. Les experts lors ce forum sont également divisés sur le contenu du mix énergétique qui assurera la couverture de nos besoins énergétiques à moyen et long termes. Pour les uns, le renouvelable doit dominer ce mix. Pour les autres, le conventionnel et le non-conventionnel dont le gaz de schiste seront des constituants importants de ce mix avec le renouvelable. On ne pourra couvrir nos besoins à l'horizon 2030-2040 sans ces énergies fossiles. Ni sur le gaz de schiste ni sur les énergies renouvelables, les pouvoirs publics ne sont parvenus à un consensus sur le mode opératoire qui recueille l'unanimité sur l'exploitation de ces ressources. En attendant d'avancer dans le renouvelable et l'efficacité énergétique, on ne peut rester les bras croisés devant le grand gaspillage de produits pétroliers et d'électricité. Notre parc automobile roule essentiellement au diesel. Cette situation est économiquement intenable. Elle épuise nos réserves pétrolières, favorise les importations de carburants, tend à baisser nos exportations de produits raffinés, pollue l'air des grandes villes. En somme, une perte sèche annuelle de plusieurs milliards de dollars, alors que le gaz naturel comprimé et le GPL, plus disponibles et moins polluants, sont peu utilisés. Ainsi, sans rationalisation de notre modèle de consommation énergétique, l'Algérie court à la catastrophe avec un épuisement plus tôt que prévu de nos réserves de pétrole et de gaz, et une tendance à la baisse de nos exportations d'hydrocarbures, en contexte d'explosion de la demande domestique en produits énergétiques. K. R. Lire le dossier