Résumé : Le voyage au Sud, auprès de sa famille, n'était en fait qu'un subterfuge pour calmer ses angoisses. Mordjana voulait se ressourcer auprès des siens. Elle est tout de suite happée dans l'engrenage d'un accueil chaleureux. Ses frères et sœurs se pressaient autour d'elle et de Samir. Ce dernier est incommodé par la chaleur. La jeune femme s'empresse de le faire entrer dans la maison. La pénombre y régnait et comme le toit était en toub, la fraîcheur les accueille. Samir se remet à s'éventer. Elle lui prend la main et l'entraîne vers une chambre. Il se laisse tomber sur un canapé et s'adosse contre le mur. Elle court chercher de l'eau et lui en asperge le visage, avant de lui tendre un verre de citronnade. -Bois... Tu te sentiras mieux dans quelques minutes. Samir prit une gorgée puis relève les yeux vers la porte. Une femme les observait en silence. Suivant son regard, Mordjana se retourne pour rencontrer le regard de sa mère. Cette dernière ne semblait pas heureuse de la revoir. La jeune femme s'approche d'elle et l'embrasse avant de lui prendre la main pour la présenter à son mari. -Maman, voici Samir, mon mari... Vous vous êtes déjà parlés quelquefois au téléphone, mais jamais rencontrés. Le jeune homme se lève et embrasse sa belle-mère sur le front, comme le lui avait recommandé sa femme. -Je suis heureux de faire ta connaissance, belle-maman. Elle hoche la tête sans dire un mot, puis revint vers sa fille qu'elle toise de haut, avant de passer une main sur sa joue. Mordjana sourit : -Tu vois maman... Ma tache de vin n'est plus qu'un mauvais souvenir. Sa mère affiche une petite moue, puis hausse les épaules avant de sortir de la chambre. Samir interroge Mordjana des yeux : -Ne t'en fais pas Samir... Ma mère est parfois lunatique... Mais elle n'est pas méchante... Elle aussi a beaucoup souffert avec mon père... Repose-toi donc un peu... Maroua et son mari vont sûrement venir ce soir... Tu auras l'occasion de faire connaissance avec le reste de la famille. Samir s'allonge sur le canapé. Mordjana vient le couvrir d'un drap et lui recommande de boire davantage de citronnade pour étancher sa soif. Elle sort enfin et referme la porte derrière elle. Dans la cuisine où sa mère et ses jeunes sœurs s'affairaient, elle a dû faire preuve de beaucoup de patience pour garder son sang-froid devant le regard courroucé de sa génitrice. Saléha la sermonnait et lui reprochait d'avoir ramené son mari. Et pour cause : -Tu sais bien que nous n'avons pas de quoi préparer un dîner digne de ton mari, lui lance-t-elle froidement... Je pensais que tu allais venir seule... Je ne pouvais me permettre de grignoter sur le budget de la semaine... Tu sais bien que nos moyens sont limités, Mordjana. -Ne t'inquiète donc pas maman... J'ai pensé à tout. Elle prend son sac et retire quelques billets : -Voici de quoi acheter de la viande, des légumes et des fruits... Samir ne connaît pas encore sa belle-famille... C'était mon idée ce voyage... Les mains sur les hanches, sa mère regardait les billets d'argent qu'elle lui tendait : -Tu crois que tu vas pouvoir nous narguer avec cet argent gagné à ton boulot ? -Vous narguer ? Mais que vas-tu encore chercher là maman ? Je viens chez mes parents, pas chez des étrangers ! -Ton mari est toujours un étranger pour nous... -Pas du tout... Il n'est pas aussi snob que tu le penses. Samir est un ange... Ne froisse pas sa susceptibilité s'il te plaît maman. -Hein ? Tu parles déjà de susceptibilité ? Mais que lui as-tu donc raconté sur nous ? -Rien de faux... J'ai parlé de toi, de papa, de tout le monde... Il vous connaît déjà un peu... -Ton père n'est pas là comme à ses habitudes... Comment va-t-on justifier son absence ? -Tu oublies que "le marché" de notre mariage a été conclu entre mon père et le sien... Samir connaît tout de notre vie, et un bon bout sur papa... Il a vécu la même chose dans sa famille... Aïssa, son père, s'absente pour de longues périodes, lui aussi... Sa mère hausse les épaules et repousse les billets d'argent : -Achète ce que tu veux... Laïd pourra se rendre au souk avant le crépuscule... (À suivre) Y. H.