De lourdes peines ont été prononcées hier, dans la salle d'audience du tribunal d'Es Senia, à l'encontre des 23 prévenus d'El-Kerma arrêtés durant la journée et la nuit du 12 décembre lors des émeutes qui avaient éclaté pour protester contre la liste d'attribution des logements sociaux de la commune. Il est 15h30 lorsque le président du tribunal réapparaît après une heure de délibération. Dans une salle d'audience où n'ont été autorisés que quelques rares parents des prévenus, le président énonce les condamnations, à savoir 4 peines de prison ferme de 18 mois, 7 condamnations à 6 mois ferme, 6 condamnations avec sursis et enfin 6 relaxes, alors que le procureur qui n'avait fait aucune distinction avait requis 2 ans de prison ferme et 500 DA d'amende pour l'ensemble des 23 prévenus. Au même moment, à l'extérieur, la foule très importante et les proches parents et amis des prévenus sont massés devant les grilles ; ils attendent ainsi depuis 2h du matin. À l'annonce des condamnations dans la salle, des mères éclatent en sanglots alors que d'autres soulagées s'écrient El Hamdoulilah. Au cours des débats, seuls 3 des prévenus ont reconnu avoir participé aux émeutes et avoir jeté des pierres sur les forces de police. Tous les autres ont nié les faits qui leur étaient reprochés, à savoir attroupement illégal, dégradation des biens publics et des biens privés. D'ailleurs, dans leur majorité, ils ont déclaré au président avoir été arrêtés à leur domicile vers 2 heures du matin ou encore alors qu'ils se trouvaient dans des ruelles et n'ayant pourtant aucun lien avec les violences qui ont émaillé les émeutes. L'un des prévenus ayant reconnu sa participation déclarera au président avoir bloqué l'accès de l'APC D'El-Kerma mais, dira-t-il : “J'ai jeté des pierres parce que les policiers ont frappé des femmes qui étaient avec nous et les ont insultées… J'ai défendu mes droits à El-Kerma, c'est trop…” Aussitôt le président du tribunal lui coupe la parole et l'apostrophe : “Tu as des droits mais ce n'est pas de cette façon que tu dois les réclamer en cassant et en brûlant la ville.” Les trois prévenus ayant reconnu les faits ont été condamnés à 18 mois de prison ferme. Le quatrième prévenu ayant écopé de la même peine est un membre de l'Unja locale. Accusé d'être l'un des meneurs, il niera en bloc en expliquant qu'il avait servi d'intermédiaire et qu'il avait aidé les citoyens à rédiger leur recours. À l'annonce de sa condamnation, ce dernier s'évanouira, il sera évacué de la salle par des policiers. Quant aux avocats de la défense, ils axèrent leur plaidoirie sur le vide du dossier d'accusation et en démontrant que les 23 prévenus ont été arrêtés individuellement et sans motif et qu'il n'y a dans leur arrestation aucun lien de lieu et de temps par rapport aux émeutes qui ont émaillé El-Kerma. Tous les avocats demandèrent l'acquittement de leurs clients. Seuls 6 sur les 23 le seront au terme d'un procès qui n'a pas abordé le fond du problème. Un avocat rappellera qu'il s'agissait d'une affaire sociale aux causes plus anciennes et plus profondes. F. B.