Le pèlerinage juif à la synagogue de la Ghriba, dans l'île de Djerba, n'aura pas dérogé au rituel : il s'est déroulé dans de bonnes conditions, grâce à la vigilance des autorités tunisiennes, malgré les appréhensions sécuritaires exprimées quelques jours plus tôt par le gouvernement israélien, lequel redoutait des attentats anti-juifs. Les autorités tunisiennes ont, en effet, déployé un dispositif sécuritaire imposant. Si imposant que la population de l'île de Djerba a vécu, durant une dizaine de jours, dans un territoire encerclé par les forces de sécurité avec la contribution d'unités de l'armée nationale. Tout était filtré de manière à assurer aux 1 500 juifs tunisiens et aux trois cents autres venus de l'étranger d'accomplir leur rite religieux dans la quiétude. Il faut dire que l'attaque terroriste du musée du Bardo, le 18 mars dernier, ne laissait pas de choix aux autorités tunisiennes pour donner une bonne image d'une Tunisie jouissant de sécurité. Le pari est si important pour la Tunisie qui mise énormément sur la relance du tourisme. Car, suite à l'attentat du Bardo, les réservations ont connu une chute vertigineuse, lorsque ce ne sont pas des annulations pures et simples, comme c'est le cas des croisières. Aussi, les autorités, en particulier le ministère du Tourisme, ont-elles concocté un programme de relance à travers une campagne en Europe en mettant à contribution des personnalités influentes dans leur propre pays pour espérer redonner vie à un secteur qui a du mal à atteindre le niveau de l'année 2010. Ainsi, en sécurisant au maximum le traditionnel pèlerinage de la Ghriba, le gouvernement aura gagné le défi de donner une belle image de la Tunisie et aura répondu, par l'acte, aux allégations du Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu qui, quelques jours avant l'accomplissement des rites, appelait les juifs du monde entier et les Israéliens en particulier à boycotter ce pèlerinage sous prétexte qu'il présentait des risques d'attentat contre ses coreligionnaires. En faisant le bilan du pèlerinage, les autorités devraient sans doute tirer quelque fierté dans la mesure où elles ont réussi à l'organiser sans "dégâts", mais aussi en affichant l'image d'un pays tolérant. Signes de cette fierté et de cette tolérance : les ministres du Tourisme et de la Culture (deux femmes) ont assisté aux festivités tandis que le ministre des Affaires religieuses donnait l'accolade au grand rabbin de la Ghriba. Autant de messages destinés à attirer les touristes étrangers cibles des attentats terroristes. La Tunisie, qui a montré ses capacités d'organisation de grandes manifestations, a-t-elle gagné pour autant le pari d'une bonne saison touristique ? Les Algériens, par leur fidélité à la Tunisie, pourront toujours la sauver. C'est, du moins l'espoir des autorités, voire presque une certitude. M. K.