Les 150 000 soldats américains et la garde irakienne ne savent plus où donner de la tête, devant les frappes meurtrières de la guérilla. Une guerre de fetwas, sur le djihad en Irak et sur la participation au vote, bat son plein. Toutes les mesures de sécurité mises en place pour contrer les attentats et autres attaques menés contre tout ce qui est américain ou qui représente le pouvoir n'ont servi à rien jusqu'à présent. À l'approche des élections générales prévues pour le 30 janvier prochain, l'on assiste à une recrudescence sans précédent de la violence. L'appel d'Oussama Ben Laden à boycotter le vote, dans lequel il reconnaît au Jordanien Abou Mossaâb Al-Zarqaoui le titre d'émir d'Irak, semble précipiter les choses dans un pays à feu et à sang. Aux quarante-deux Irakiens tués durant la journée de mardi, viennent s'ajouter trente autres morts dans un attentat survenu dans la nuit de mercredi dans l'explosion qui a visé une maison dans le quartier Ghazaliya à Bagdad. La déflagration s'est produite au moment où les policiers qui encerclaient la maison suspecte s'apprêtaient à donner l'assaut. Ces développements dramatiques augurent d'élections sanglantes si jamais elles sont maintenues à la date prévue. Désemparés, les Irakiens voient leur pays s'embraser chaque jour davantage. À la fetwa du grand ayatollah Ali Sistani, rendant la participation aux élections obligatoire pour tous les Irakiens, Oussama Ben Laden décrète le contraire. En effet, non seulement il déclare “infidèle” tout participant à ce vote mais met les Irakiens face aux dangers qu'ils encourent si jamais ils prennent part à ces élections, en tant que candidats ou électeurs. Il répond ainsi, à la fetwa rendue par le cheikh Abdelaziz Al-Cheikh, le grand mufti du royaume d'Arabie Saoudite, qui avait affirmé que le fait d'envoyer “des jeunes pour combattre l'occupation en Irak était illicite parce qu'il n'y a pas de bannière sous laquelle ils se battent”. Le patron de la nébuleuse Al-Qaïda conforte, par contre, l'avis religieux rendu par vingt-six ulémas saoudiens appelant au djihad contre l'occupation en Irak. La sortie médiatique a été interprétée par le directeur de l'Observateur islamique de Londres, Yasser Al-Sirri, comme une fetwa donnant une assise juridique par rapport à la charia à l'appel au djihad. Selon lui, en intronisant Abou Mossaâb Al-Zarqaoui comme émir de l'Irak, le patron d'Al-Qaïda donne l'argument manquant jusque-là, à savoir la bannière sous laquelle est mené le combat, comme l'exige la charia. C'est à une véritable guerre de fetwas que se livrent les parties concernées. En attendant, les Américains et le gouvernement d'Iyad Allaoui persistent à vouloir tenir les élections à la date fixée, malgré la recrudescence de la violence. Cela n'augure rien de bon pour le peuple irakien, qui est entre l'enclume et le marteau. Al Zarqaoui revendique l'attentat manqué contre Hakim Un site internet islamiste a diffusé mardi un communiqué attribué au groupe de l'islamiste Abou Moussab Al-Zarqaoui, lié au réseau terroriste Al-Qaïda, revendiquant la tentative d'assassinat du dirigeant du principal parti chiite d'Irak, Abdel Aziz Hakim, lundi à Bagdad. “Un lion de l'unité des candidats au martyre, relevant de la branche militaire d'Al-Qaïda au pays du Rafidaïn (la Mésopotamie) a tenté lundi matin d'éliminer l'un des symboles des mécréants et des traîtres (…). Nous te disons, Hakim, que si une flèche t'a raté, il en reste encore d'autres”, lit-on dans le communiqué mis en ligne sur le site. Le communiqué, dont l'authenticité reste invérifiable, maintient sa menace contre Abdel Aziz Hakim, chef du Conseil suprême de la révolution islamique en Irak (Csrii). K. A.