Résumé : Mordjana étonne son mari par son envie d'adopter un enfant. Le sujet était revenu dans leurs conversations à maintes reprises dans le passé, mais elle avait toujours refusé cette idée... Aujourd'hui, elle revenait sur ses dires et proposait elle-même cette ultime solution à leur problème... Samir se rendit alors compte que depuis qu'il avait renoué avec Ilhem, le sujet lui était totalement sorti de la tête. Il s'étire et jette un coup d'œil à sa montre. Il se faisait tard, et le lendemain une longue journée l'attendait. Mordjana somnolait dans ses bras. Il éteint la lumière et sombre dans un profond sommeil. Au petit matin, il sortit discrètement de sa chambre et se rendit dans la cuisine. Son épouse dormait encore, mais sa mère était déjà levée et avait préparé le petit-déjeuner. Il s'attable et elle lui verse un café fumant. -Alors, tu as bien dormi ? Il hoche la tête : -Oui... Assez bien. -Ces derniers temps, tu me paraît préoccupé et pensif... Il hausse les épaules. -Je suis un peu dépassé par les événements...Voilà tout. -Quels événements ? Tu parles de ta femme et de ses angoisses ? -Oui... Mordjana est instable ces derniers temps... La voir aussi malheureuse, ça me chagrine... Hasna demeure silencieuse un moment. Elle se lève et ouvrit le placard pour retirer un pot de confiture qu'elle dépose sur la table. -J'ai préparé une bonne confiture de cerises...Je sais que tu en raffoles... Aller, régale-toi... Samir ne bouge pas. Il avait allumé une cigarette, comme à ses habitudes lorsqu'il se sentait mal dans sa peau. -Dis-toi que ce n'est pas la fin du monde si Mordjana ne te donne pas un enfant... Comme il ne répondait pas, Hasna prend un morceau de pain et se met à étaler dessus une couche de beurre, puis une autre de confiture. Elle tendit la tartine à son fils, qui la prend pour la tremper, sans mot dire, dans sa tasse de café au lait. -Tu vois, reprend sa mère, parfois le destin s'en mêle... Si Mordjana ne tombe pas enceinte, tu pourras toujours la répudier et prendre une autre femme. Samir sursaute et lève brusquement les yeux vers sa mère. -Tu n'es pas sérieuse maman... Elle hausse les épaules : -Qui pourrait l'être de nos jours ? Tout le monde court derrière ses intérêts... Pourquoi pas toi ? -Je ne cours derrière aucun intérêt mère... J'ai fait des études, et je continue à faire de la recherche pour améliorer mes connaissances et créer des projets à long terme. Mon métier d'architecte me passionne. J'ai réussi dans ma vie professionnelle et... -Et tu as raté ton avenir conjugal. -Pourquoi dis-tu cela ? -C'est la vérité, n'est-ce pas ? La vérité fait mal mon fils... Tu refuses de voir la réalité en face. Ta femme est stérile, elle ne pourra jamais combler ton envie d'avoir des enfants et de fonder ta propre famille... Elle laisse glisser quelques larmes sur sa joue et prend un mouchoir pour s'essuyer les yeux avant de poursuivre : -J'ai longtemps rêvé, moi aussi, de mettre tes enfants sur mes genoux... Hélas ! Je crains de fermer mes yeux pour toujours sans voir ce vœu se réaliser. Agacé par la tournure de la conversation, Samir se lève : -Arrête de pleurer maman. Je suis assez secoué dans mon quotidien, ne rajoute donc pas ton chagrin à mon désarroi... Si Dieu ne veut pas faire de moi un père, que veux-tu que j'y fasse ? Sa mère se lève à son tour et s'approche de lui pour le prendre par les épaules : -Tu peux faire beaucoup de choses mon fils... Elle baisse les bras et reprend d'un air triste : -Si tu veux m'écouter, nous allons trouver un tas de solutions logiques et efficaces... Mais ces derniers temps, tu es influencé par ta femme... Mes conseils ne comptent plus pour toi. Samir fronce les sourcils : -Tu fabules maman... Je ne suis pas une marionnette qu'on manipule à sa guise... Personne ne pourra m'influencer... Je suis assez mûr pour savoir ce que je dois faire. Pourquoi penses-tu donc que tes conseils ne comptent pas pour moi ? -Tu veux que je te le dise : eh bien, ces derniers temps tu m'ignores totalement... Lorsque tu daignes discuter avec moi, je me sens comme une étrangère avec qui on se sent obligé d'échanger quelques formules de politesse... Samir baisse la tête : -C'est ce que tu crois mère ? -Je le confirme plutôt... Ah ! Mon fils ! Si tu pouvais estimer le fardeau de mon chagrin et de ma tristesse lorsque tu traverses la cour en m'embrassant hâtivement sur le front, sans pour autant daigner t'arrêter pour échanger ne serait-ce que quelques paroles avec ta vieille mère... Y. H. (À suivre)