Ce chef terroriste, qui a ouvertement revendiqué l'exécution de jeunes djounoud dans les maquis de Jijel, table sur une possible amnésie des Algériens, cultivée par la politique de réconciliation nationale, pour tenter de revenir par effraction sur la scène politique. "L'exercice de l'activité politique est interdit, sous quelque forme que ce soit, pour toute personne responsable de l'instrumentalisation de la religion ayant conduit à la tragédie nationale. L'exercice de l'activité politique est interdit également à quiconque, ayant participé à des actions terroristes, refuse, malgré les dégâts commis par le terrorisme et l'instrumentalisation de la religion à des fins criminelles, de reconnaître sa responsabilité dans la conception et la mise en œuvre d'une politique prônant la violence contre la nation et les institutions de l'Etat." Ces mesures engagées pour prévenir la répétition de la "décennie noire" sont exposées dans l'article 26 de l'ordonnance n°2006-01 du 27 février 2006 portant mise en œuvre de la "Charte pour la paix et la réconciliation nationale". Pourtant, en août dernier, soit neuf ans après la promulgation de ces textes, qui coïncide avec le 10e anniversaire de l'adoption de la loi sur la réconciliation nationale, Madani Mezrag, ex-chef de l'AIS, bras armé du FIS dissous, annonce la création d'un parti politique appelé "Front de l'Algérie pour la réconciliation et le salut" (Fars), lors d'une rencontre, dans la wilaya de Jijel. Le 27 août, il déclare à TSA avoir "le soutien des éléments de l'ex-FIS" et informe également qu'il va déposer une demande d'agrément auprès du ministère de l'Intérieur. Mezrag va même jusqu'à expliciter les "trois" phases destinées à concrétiser son projet partisan. "D'ici à une année, au plus tard, on sera prêts", précise-t-il à la même source. La tentative d'intrusion de Madani Mezrag sur la scène politique intervient notamment après l'éclatement, il y a près de 2 ans, de la crise au sommet de l'Etat, plus connue sous la dénomination "conflit Présidence-DRS". En bon épouvantail, celui-ci est réapparu, aux côtés d'autres islamistes, à l'exemple de l'agitateur salafiste Abdelfattah Hamadache, chef du parti "Le Front de Sahwa", qui n'a jamais été agréé, pour effrayer les Algériens. Depuis, l'ancien chef de l'AIS n'a pas cessé d'enfreindre ses devoirs face à la Charte pour la réconciliation nationale. L'heure est grave, sinon comment se fait-il qu'un Madani Mezrag, qui, de son propre aveu, a les mains tachées de sang et qui est donc l'un des responsables de la "tragédie nationale", continue-t-il à narguer la société algérienne ? Comment se fait-il aussi qu'après les nombreuses promesses des plus hautes autorités du pays d'exclure "tout retour" des anciens responsables du parti islamiste dissous sur la scène politique, la loi soit piétinée par l'ancien activiste du FIS et ex-chef de la défunte AIS, puisque ce dernier est reçu comme "une personnalité nationale" à la présidence de la République, dans le cadre du dialogue autour de la réforme constitutionnelle, qu'il organise des universités d'été à Jijel (2014) puis à Mostaganem (2015), qu'il s'implique dans des meetings publics et qu'il pousse même le bouchon jusqu'à proclamer la naissance d'un parti islamiste ? Bien que la loi soit au-dessus de tous, il a fallu attendre quelques jours pour enregistrer enfin la réponse du ministre de l'Intérieur, puis celle du Premier ministre annonçant son refus d'agréer la formation politique Fars. "On parle ces derniers temps du retour politique d'un parti dissous. La loi portant Charte pour la réconciliation nationale est appliquée depuis 10 ans. (...) Ce texte a accordé des dispositions à ces gens (les terroristes, ndlr), des droits et des devoirs. Aujourd'hui, certains veulent revenir sur ces devoirs. (...) Chacun doit donc s'en tenir à ce qui est inscrit dans cette loi. Nous ne permettrons à personne, quel que soit son statut, de nous renvoyer dans la crise que nous avons subie durant les années 90", a déclaré Abdelmalek Sellal, le 2 septembre, soit une semaine après la dernière sortie de Mezrag de Jijel, en se référant à l'article 26 de ladite loi. Certaines voix ont précédé le Premier ministre, d'autres ont fait écho à ses déclarations. Dans ce cadre, outre la sortie de l'ex-président de la cellule chargée de l'application des dispositions de la Charte pour la réconciliation nationale, on retiendra l'appel-pétition lancé, fin août, par la société civile, pour poursuivre Madani Mezrag pour "crime contre l'humanité", ainsi que l'indignation des victimes du terrorisme, des Patriotes, des rappelés du Service national et des gardes communaux. H. A.