Madani Mezrag a encore parlé. Cette fois-ci à l'antenne d'une télé saoudienne. Pour dire que le FIS dissous, chassé par la porte judiciaire et politique, reviendrait par la fenêtre de la... Constitution ! Ce discours du retour du FIS, sans cesse différé, n'est pas nouveau. C'est même une antienne chez nombre de ses anciens dirigeants, dont Madani Mezrag, l'ex-chef de son bras armé l'AIS. Passons sur la boursouflure des propos de Mezrag quand il dit qu'il est «un acteur essentiel de la crise et une partie de la solution» politique en Algérie. Retenons en revanche l'idée centrale de l'éventuelle réhabilitation politique du FIS. Mezrag fut un acteur fondamental de la crise politique des années 1990 et de l'engrenage meurtrier qui s'en est suivi, c'est sûr ! Mais qu'il puisse constituer une «partie de la solution» aujourd'hui, on en est moins sûr. Cela dépendra beaucoup de la volonté du pouvoir de le considérer ou pas comme tel. Ce n'est sans doute pas à l'intéressé de s'octroyer ce statut politique. Dans la galaxie FIS, il ne fait pas partie des dirigeants historiques. Sa légitimité n'est pas plus forte que celle d'un Ben Aïcha, un porteur d'armes comme lui. Pas plus forte par ailleurs que celle d'un Madani, d'un Belhadj, d'un Djeddi ou même d'un Haddam. Madani Mezrag est toujours dans le registre de l'autoproclamation et de l'autoglorification. Le fait d'avoir été entendu par Ahmed Ouyahia au sujet de la prochaine révision constitutionnelle n'est pas en soi une prime politique. Un bonus de légitimité. Mais revenons au fond du problème. A savoir, la réintégration politique du FIS. Pour l'instant, et sous réserve d'un nouveau droit constitutionnel, la loi empêche le retour du FIS sur la scène politique, sous quelque forme que ce soit. L'article 26 de l'ordonnance relative à l'application de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale est clair à ce sujet. Il stipule que «l'exercice de l'activité politique est interdit, sous quelque forme que ce soit, pour toute personne responsable de l'instrumentalisation de la religion ayant conduit à la tragédie nationale». Et qu'il est «interdit également à quiconque, ayant participé à des actions terroristes refuse, malgré les dégâts commis par le terrorisme et l'instrumentalisation de la religion à des fins criminelles, de reconnaître sa responsabilité dans la conception et la mise en œuvre d'une politique prônant la violence contre la Nation et les institutions de l'Etat». Justement, c'est le cas de Mezrag et de ses acolytes de l'AIS, repentis ou pas. Et même si l'accord secret signé le 20 août 1997 entre Mezrag et l'ANP prévoit une amnistie générale en faveur de l'AIS, cette grâce n'a jamais été votée pour autant. Depuis, on a considéré tous ceux qui sont morts durant les années de terrorisme comme des «victimes de la tragédie nationale». La question du come-back du FIS a été pourtant tranchée par le chef de l'Etat, en accord avec l'ANP. Jusqu'à plus ample informé et jusqu'à preuve du contraire, il n'en a jamais été question. N. K.