Il doit répondre des chefs d'inculpation de "destruction de documents" et d'"infraction aux consignes". Le très attendu procès du général Hassan, ancien chef de la direction de la lutte contre le terrorisme au sein du Département du renseignement et de la sécurité (DRS), s'ouvre aujourd'hui au tribunal militaire d'Oran dans un contexte marqué par une série de bouleversements du service de renseignement algérien. L'homme fort de la lutte antiterroriste des années 1990 et 2000, proche du général Mohamed Mediene, dit Toufik, devrait répondre, selon son avocat, Me Mokrane Aït Larbi, des chefs d'inculpation de "destruction de documents" et d'"infraction aux consignes militaires". Le général Hassan, de son vrai nom Abdelkader Aït Ouarabi, a été arrêté dans la soirée du 27 août dernier à son domicile algérois — en exécution d'un mandat d'arrêt délivré par le juge du tribunal militaire en 2014 — et déféré le lendemain par devant le tribunal militaire de Blida où il a été mis en détention. Pendant les premiers jours de son incarcération, il ne pourra avoir accès à son avocat, Me Abdelmadjid Sellini, ce qui, pour ce dernier, constitue une violation d'un des droits élémentaires garantis par la loi. D'ailleurs, dans une conférence de presse, le bâtonnier d'Alger n'hésitera pas à qualifier d'illégale la poursuite de son client et d'arbitraire son arrestation. À cause de ces déclarations ou pour d'autres motifs, le tribunal militaire de Blida décidera de rejeter la constitution de Abdelmajid Sellini en tant qu'avocat du général Hassan. Ce dernier sera finalement représenté par Mokrane Aït Larbi qui, lui aussi, dénoncera l'interpellation de son client qui s'est opérée en violation de l'article 122 du code de procédure pénale qui stipule que "l'agent chargé de l'exécution d'un mandat d'arrêt ne peut pénétrer dans le domicile d'un citoyen avant 5h et après 20h". Or, l'arrestation est survenue vers 22h. Trois mois après cet événement, abondamment commenté par la presse nationale et internationale, le dossier Hassan est transféré au tribunal militaire d'Oran, en application de l'article 30 du code de justice militaire qui stipule qu'un officier dont le grade est supérieur à celui de capitaine bénéficie du privilège de juridiction ; autrement dit, qu'il ne peut être jugé par le tribunal dont relève la région militaire où il exerce. À côté de ces péripéties judiciaires, l'affaire général Hassan présente un aspect politique qui interpelle les observateurs avertis et le commun des Algériens : d'abord, parce qu'il est très rare qu'un général soit incarcéré, encore moins dans les conditions que l'on sait, et que, de surcroît, il doit répondre d'accusations devant un tribunal, ensuite, parce que l'arrestation est intervenue dans un contexte marqué par plusieurs limogeages d'officiers supérieurs de l'armée, la mise aux arrêts du général Benhadid pour ses déclarations, le départ-limogeage du tout-puissant patron du DRS, le général-major Mediene, et d'autres événements qui ont agité l'été 2015 et fait craindre le pire, y compris chez certaines personnalités politiques dont Ali Benflis, président de Talaie El-Hourriyet, et Louisa Hanoune, la SG du Parti des travailleurs. Le premier a parlé de "stratégie d'épuration politique pour crime de non-allégeance" et la seconde a estimé qu'il était ici question de "l'effritement du dispositif de lutte contre le terrorisme". Si de très nombreux observateurs pensent improbable que le procès de ce jeudi apportera des réponses aux interrogations que pose l'arrestation du général Hassan, Mokrane Aït Larbi rétorque, lui, que c'est l'occasion de faire éclater la vérité. Pour lui, le procès devrait être public et bénéficier du témoignage de plusieurs responsables militaires, dont le général Toufik. Il reste à savoir si le tribunal militaire d'Oran exaucera ses vœux. S. O. A.