Ils ont dénoncé le retard dans le versement de leurs salaires et mettent surtout en garde contre un plan qui viserait à la liquidation de l'entreprise. De violentes émeutes ont secoué, hier, la zone industrielle de Rouiba lorsque des travailleurs de la SNVI sont sortis dans la rue pour dénoncer un autre retard (un de trop dans le versement de leur salaire). On dénombre 16 blessés et 10 arrestations parmi les travailleurs de la filiale VIR (Véhicules industriels de Rouiba) à la suite de ces premiers affrontements du genre depuis 1988 qui ont réveillé le souvenir des tristes émeutes du 5 Octobre 1988. Selon des sources hospitalières, deux travailleurs ont été grièvement blessés. L'un a été transféré à l'hôpital Zmirli à Alger. Les violences ont commencé lorsque des dizaines de gendarmes ont tenté de libérer à coups de gaz lacrymogènes, la route reliant Rouiba à Alger bloquée depuis 9h du matin par des blocs de pierre et des pneus brûlés. Les manifestants ont été suivis par les gendarmes dans l'enceinte même de l'usine où une dizaine d'entre eux ont été arrêtés puis embarqués dans des fourgons. "C'est la première fois dans l'histoire de la SNVI que les gendarmes pénètrent dans l'usine, cela ne s'est pas produit même lors des événements du 5 Octobre 1988", s'insurge un manifestant. Les travailleurs, solidaires avec leurs collègues interpellés, ont exigé leur libération et, dans la foulée, ils ont demandé le départ des cadres dirigeants de la SNVI coupables, à leurs yeux, de vouloir "liquider" l'entreprise. Ils en veulent pour preuve, le manque d'imagination pour sortir la SNVI du marasme dans lequel elle se trouve. "Les caisses d'exploitation sont vides d'où ces problèmes récurrents de salaires non versés à temps", affirme un cadre de l'entreprise qui explique cette situation par la mauvaise gestion de certaines filiales. "Des centaines de véhicules bloqués à la livraison pour de petites pièces non commandées, un plan d'investissement mal appliqué, et une commande de deux ans non assumée", affirme un autre travailleur en colère. D'autres manifestants ont émis des doutes sur la volonté réelle des cadres de remettre l'entreprise sur les rails malgré les sommes colossales dégagées par l'Etat à la SNVI. Les travailleurs disent ne pas comprendre le traitement de faveur accordé aux nouvelles filiales tells que la SAPPL-MB (Société algérienne pour la production de poids lourds de marque Mercedes Benz) dont le partenaire technologique, Daimler, détient 49% ou encore la filiale RAP (Renault Algérie production, détenue également à 49% par la marque française Renault. Le P-DG, Malek Salah, a justifié une telle situation, il y a deux semaines, par le fait que ces filiales, qui font partie du groupe SNVI, sont nouvelles. "Ce sont des nouvelles entreprises et c'est pour cela qu'elles ont des facilités." Le P-DG avait également admis, lors de cette rencontre, d'énormes difficultés de trésorerie au sein de l'entreprise notamment dans son budget d'exploitation. "Nous n'arrivons pas à dégager de l'argent pour l'exploitation, c'est-à-dire pour les salaires, les frais de dédouanement et l'importation des pièces", précisant que "les banques ne veulent plus nous suivre dans cette démarche car nous avons plus de 13 milliards de stock alors que nous ne faisons que 10 milliards de chiffre d'affaires, ce stock est dû surtout à la mauvaise définition des besoins des pièces et des commandes". Le même responsable reconnaît que plus de 3,5 milliards de dinars sont constitués de "bonsauf", c'est-à-dire de produits bons et finis, mais non livrés à cause du manque de petites pièces. Sur les perspectives de l'entreprise, le P-DG a parlé d'un programme de reconversion de 11 000 bus qui roulent au gasoil pour les transformer en gaz butane GNV (Gaz naturel pour véhicule) et GNC (gaz naturel comprimé). "Nous devons désormais produire ce genre de véhicules, c'est un créneau à exploiter, un prototype est en cours de fabrication", dira-t-il. Il évoque, également, le bus 4x4 que la SNVI compte lancer, le projet est à l'étude comme il annonce la réalisation d'un showroom de 8 000 m2 propre à la SNVI ou encore la fabrication d'un autre produit, il s'agit d'un camion de 9 tonnes. Le programme d'investissement va également cibler l'environnement, les ateliers, la toiture et l'éclairage comme il fera de l'unité VIR une base industrielle, dit-il. Un optimisme qui est loin d'être partagé notamment par les travailleurs qui n'arrivent pas à percevoir leurs salaires à temps alors que les primes PRI et PRC sont bloquées depuis deux ans, souligne un syndicaliste qui nous a appris que le conseil d'administration de l'entreprise va se réunir, aujourd'hui, à Rouiba, et s'attend à d'importantes décisions. M. T.