La vie nationale est réduite à deux acteurs : Bouteflika et son équipe d'un côté, et les opposants de l'autre. Les uns proposent et décident, les autres contestent, protestent et menacent. L'Algérie — institutions, partis, médias et observateurs — est suspendue à une échéance électorale qui surviendra dans dix-huit mois. Tout est bloqué ou presque, et les acteurs politiques sont réduits à guetter la moindre occasion pour s'exprimer, se positionner ou se repositionner, c'est selon, par rapport à l'élection présidentielle. Les différents clans concernés par cette échéance s'activent ou plutôt s'agitent en prévision de ce rendez-vous décisif. Toute action et activité sont interprétées comme des manœuvres politiciennes par les antagonistes. Le citoyen, qui fait face à des problèmes quotidiennement, est pris en otage dans ces luttes d'appareils qui ne le concernent pas. L'équipe présidentielle et ses opposants se livrent une bataille sans merci au détriment des attentes des citoyens qui n'auront l'occasion de se prononcer malheureusement que dans une année et demie et encore. Les rumeurs et autres spéculations, savamment distillées par certains milieux, polluent la scène politique et médiatique. C'est sur la base de ces rumeurs qu'est alimenté le débat prématuré sur les élections d'avril 2004. Alors qu'il est presque avéré et admis que Bouteflika sera candidat, on prête au Chef du gouvernement des ambitions présidentielles qu'il n'a pas exprimées pour le moment. En tout cas pas publiquement. Il faudrait attendre le prochain congrès du FLN, dont la tenue est prévue en mars 2003, pour en savoir davantage sur ce duel Bouteflika-Benflis, si duel il y a. De même que certains présentent Ouyahia comme futur concurrent de l'actuel locataire d'El-Mouradia. S'agit-il de prévisions ou de ballons-sondes ? Ceux qui connaissent le fonctionnement du sérail répondront qu'il ne s'agit ni de l'une ni de l'autre option. N'est-il pas trop tôt pour parler du candidat du régime quand on sait que ce dernier a pour habitude de surprendre tout son monde et de fausser tous les calculs en optant pour des choix parfois inattendus comme ce fut le cas en décembre 1998. Ce sont toutes ces rumeurs qui détournent l'attention des responsables sur les problèmes de l'heure. La léthargie a gagné toutes les structures de l'Etat. Les partis, les organisations et même les associations sont braqués sur avril 2004. On n'active que pour prendre position pour untel contre untel. Tous les débats ont fini par être politisés, donc détournés de leur objectif initial. La vie nationale est réduite à deux grands acteurs : le Président et son équipe aux commandes dans les différentes institutions d'un côté, et les opposants venus d'horizons divers de l'autre. Les uns proposent et décident, les autres contestent, protestent et menacent. Cette situation d'attente et de blocage risque de durer jusqu'à avril 2004 et le citoyen pourrait payer les frais des luttes de clans. Les ambitions personnelles de certains dirigeants coûteront cher à la nation, soumise à de multiples défis. Tout est suspendu jusqu'à la fin du match. Les préoccupations et les aspirations des populations, de même que les réformes peuvent attendre. Comme avril 2004 est relativement loin, pourquoi ne pas crever l'abcès en organisant des présidentielles anticipées puisque la question empoisonne et freine le fonctionnement de la vie publique. Dans les conditions actuelles, en tous cas, le plus tôt serait le mieux. M. A.O.