Le procédé est simple : introduire des dossiers médicaux falsifiés et partager le “butin” avec le “faux” malade. Une trentaine de personnes impliquées ont été présentées, récemment, devant le juge d'instruction près le tribunal d'Hussein Dey. Trois d'entre elles ont été placées sous mandat de dépôt, alors que le reste est sous contrôle judiciaire. L'agence Cnas de la commune d'Hussein Dey vient d'être secouée par une scabreuse affaire de détournement. Une somme de 3 272 369,98 DA a été dilapidé avec la complicité des principaux responsables et préposés au guichet de cette succursale. L'affaire, désormais entre les mains de la justice, révèle l'existence d'une véritable mafia au sein de cette structure sociale. Un réseau de trafic de dossiers médicaux opère depuis quelques années déjà. Près de trente personnes sont impliquées dans ce trafic. 2 575 dossiers falsifiés Tout a commencé au mois de mai dernier, lorsque la Cnas a saisi les services de la Sûreté nationale pour enquêter sur d'éventuels détournements de deniers publics. Après six mois d'investigations, les enquêteurs de la circonscription découvrent le pot aux roses. Les soupçons sont confirmés et prouvés. Pas moins de 2 575 dossiers médicaux, couverts par une importante enveloppe financière, ont été falsifiés. Près de deux cents faux dossiers sont traités presque quotidiennement par les mis en cause au niveau de la Cnas d'Hussein Dey. Le rapport des services de la police fait ressortir l'implication du chef de l'agence et d'une dizaine d'employés. À en croire certains aveux, le chef de ladite agence serait derrière le gros du détournement. Il a, de son côté, reconnu avoir soupçonné un trafic en 2002 et rédigé un rapport dans ce sens à l'inspection. Mais les autres mis en cause lui renvoient la balle en l'accusant d'être le principal instigateur de cette affaire. Diverses preuves sont avancées. Il y a d'abord le fait que le chef de l'agence ait les mots de passe utilisés par les guichetiers pour traiter les dossiers sur micro. “Le chef était autoritaire et pouvait avoir n'importe quel mot de passe que l'employé le veuille ou pas”, aurait déclaré l'informaticien de la succursale. Selon les mêmes employés impliqués, le chef de l'agence, arguant l'entassement des dossiers, s'arrangeait pour ouvrir un nouveau guichet qui est tenu par un de ses complices. “Ce guichet n'est qu'une couverture et un moyen de faire passer ses dossiers sans attirer l'attention des autres employés, qui n'étaient au courant de rien”, raconte un autre mis en cause, qui a révélé le cas d'un assuré auquel la structure couvre jusqu'à 40 remboursements par mois, puisque étant une connaissance du chef. Plusieurs ramifications Les ramifications du trafic de dossiers médicaux vont jusqu'à des structures sanitaires limitrophes à l'agence. Les investigations de la sûreté urbaine d'Hussein Dey ont révélé l'implication de personnes activant à l'hôpital Parnet, à la polyclinique du quartier Jolie-Vue et celles de la région de Chebli. Ce sont ces personnes, médecins et infirmiers, qui tirent les ficelles. Démasqué, l'un des infirmiers a fait intervenir son frère policier pour entraver l'enquête de l'inspection et empêcher toute action en justice. Les recherches ont, également, abouti à l'implication de deux correspondants sociaux de deux entreprises. Mais il faut dire que la Cnas de la commune d'Hussein Dey n'est pas un cas isolé. Le trafic et autres détournements touchent presque toutes les succursales à des degrés différents. Les dépassements sont aussi importants que le nombre d'assurés qui y affluent quotidiennement. Des enquêtes dans ce sens ont été diligentées dans plusieurs agences, mais aucune n'a pu atterrir chez un juge. M. B.