Dans cet entretien, l'officiel français chargé de développer la coopération industrielle et technologique entre l'Algérie et la France, aborde l'évolution des relations économiques entre les deux pays et cite les projets phares de partenariat bilatéral en voie de concrétisation. Liberté : Comment analysez-vous l'état des relations économiques entre l'Algérie et la France ? Jean-Louis Levet : Les relations économiques entre les deux pays évoluent, de nouvelles dynamiques amplifient, qui contribuent à faire passer progressivement leurs relations d'un mode fondé sur le commerce à un mode fondé davantage sur la coopération : c'est-à-dire, sur des projets de partenariat concernant les fondamentaux du développement économique (formation en lien avec les besoins des entreprises, appui technologique et technique aux PME, co-production), visant l'excellence, et s'inscrivant de ce fait dans le long terme. La Déclaration de coopération et d'amitié signée par les deux Présidents en décembre 2012 à Alger constitue le cadre adéquat de l'action que nous devons conduire ensemble : une ambition commune de progrès. La France est le premier investisseur en Algérie, cette tendance doit s'affirmer beaucoup plus, compte tenu des besoins considérables de l'économie et de la société algériennes. Quelles sont les actions et projets de coopération économique conduits ou achevés depuis la dernière réunion du Comité intergouvernemental de haut niveau de décembre 2014 ? Sans chercher à être exhaustif, il s'est agi tout au long de l'année 2015 d'une part d'accompagner les projets ayant fait l'objet d'accords en 2014 et d'autre part d' initier, d'accompagner un nouvel ensemble de projets dont notamment une dizaine ont débouché sur des accords signés lors du Comité mixte économique franco-algérien du 26 octobre 2015 à Paris. Pour ce qui concerne ma mission, elle est toujours en lien étroit avec mon homologue Bachir Dehimi. Dans le premier cas, on peut citer par exemple : les accords et leurs mise en œuvre actuelle concernant la création de 4 nouvelles écoles de formation qualifiante devant répondre aux besoins de l'industrie algérienne avec le ministère de l'Industrie et des Mines (école nationale des métiers de l'industrie, école de management industriel, école d'économie industrielle, institut national de logistique) ou encore la mise en œuvre du centre d'excellence en efficience énergétique de Schneider Electric ; des accords structurants pour le développement productif de l'Algérie (industrie et services aux entreprises étroitement liés) comme ceux relatifs à la normalisation (accord triennal entre l'Afnor et l'Ianor), à la métrologie ( création d'un laboratoire national de métrologie avec le LNE français), à l'accompagnement technique et d'innovation des PME algériennes dans les domaines de la mécanique (accords signés - toujours avec le MIM - avec le Cetim, le centre technique français de la mécanique) et de l'agroalimentaire (le CTCPA, le centre technique français agroindustriel de la conservation de la production agricole). Pour ce qui concerne d'autres projets ayant débouché sur des accords fin 2015, on peut citer par exemple : l'accord-cadre dans le domaine ferroviaire signé en septembre dernier entre la SNCF et la SNTF, qui couvre un large champ de coopérations à mettre en œuvre dans les domaines de la formation, de l'ingénierie ferroviaire, du transport de marchandises, du transport de voyageurs ; l'accord dans le domaine de la propriété intellectuelle, un enjeu là aussi important pour la développement et la diversification de l'économie algérienne, entre l'INPI (l'institut français de la propriété intellectuelle) et son homologue algérien l'INAPI qui est en train de se mettre en œuvre ; des accords entre PMI comme par exemple entre la start-up françaises IP3 Group et le groupe familial Batouche pour la fabrication de machines à faire des palettes en carton. Et puis d'autres protocoles accords signés aussi au Comefa d'octobre dernier dont vous avez rendu compte, comme par exemple entre le français Systra et la SNTF dans le domaine de l'ingénierie en systèmes ferroviaires, ou encore entre le groupe Lafarge-Holcim et le groupe public algérien Gica dans le secteur du ciment et des matériaux de construction. Quelles sont les pistes de coopération qui restent à explorer ? Les besoins de la société algérienne sont considérables et le développement à venir de l'Algérie font que de nombreux domaines de coopération sont envisageables, que ce soit par exemple comme de nombreuses études le montrent et les rencontres toujours très enrichissantes que j'ai eues avec des entrepreneurs algériens, dans l'agriculture, le numérique, les services aux entreprises très liés au développement industriel, la santé (où de nombreuses actions sont en cours), les transports où il y a encore tant à faire, la ville durable et l'environnement, une autre priorité des autorités algériennes, mais aussi les énergies renouvelables, les loisirs, le tourisme ; mais il convient aussi dans le même temps de s'assurer de la mise en œuvre effective des nombreux accords que nous signons, dans l'intérêt des deux pays et de nos opérateurs respectifs (entreprises, universités, centres techniques, etc). À ce titre, signalons par exemple la tenue les 10 et 11 avril prochains à Alger durant le prochain CIHN du 3e Forum des partenariats algéro-français organisé par Business France en partenariat avec de nombreux acteurs algériens, et qui rassemblera précisément des PME des deux pays dans ces domaines clés que sont notamment l'agroalimentaire, la santé, le numérique et les transports. Comment voyez-vous les perspectives de développement de la relation économique algéro-française ? Multiplier les ponts entre les deux pays est une perspective de plus en plus partagée entre nos économies respectives ; je le constate tous les jours dans mes déplacements tant en France qu'en Algérie ; les difficultés de toutes sortes liées notamment à un environnement mondial de plus en plus incertain doivent constituer autant de facteurs nous motivant pour aller plus loin et plus vite ensemble. K. R.