Sans la modernisation politique, il serait vain de parler de la rénovation économique ou encore de la réforme sociale, a estimé d'emblée le président de Talaie El-Hourriyet, Ali Benflis, lors de son meeting populaire animé, hier, à Tamanrasset. Dans une salle pleine à craquer, l'ancien chef de gouvernement a brossé un tableau peu reluisant de la situation économique du pays et évoqué "l'archaïsme politique" qui affecte sérieusement l'Algérie. "L'archaïsme politique, c'est le pouvoir personnel, le culte de l'homme providentiel et le pouvoir à vie. C'est aussi des institutions qui ne sont ni légitimes ni représentatives, de la base au sommet. L'archaïsme politique s'explique à travers des médiations clientélistes, claniques et rentières qui supplantent les véritables médiations politiques, économiques et sociales, que seule la société civile peut offrir", a-t-il laissé entendre. Benflis a ainsi jeté l'opprobre sur ceux qui utilisent l'Etat "à des fins privatives" ainsi que ses institutions, censées être des institutions républicaines, mais qui abandonnent l'exercice de leurs prérogatives constitutionnelles pour se transformer en appareils dépendant du régime. Sans l'archaïsme politique, notre pays serait-il resté sans chef en ces moments critiques ? Le centre de décision étant vacant, serait-il devenu la proie des forces extraconstitutionnelles qui l'utilisent à leur guise et en font ce que bon leur semble ? Benflis répond par l'affirmative en justifiant ces propos par la banalisation de la corruption et la grande criminalité financière dans ce pays qui s'attelle à exclure de son lexique politique le contrôle et la reddition des comptes, à l'exemple des 800 milliards de dollars qui auraient été dilapidés ou livrés à une prédation. "L'on vous parle souvent de l'Etat civil, de démocratie responsable ou de démocratie apaisée. Ce sont là des concepts creux, sans consistance et sans signification, et tous les régimes totalitaires, lorsqu'ils sont dans la tourmente, ont recours à ces détournements de concepts pour éviter l'essentiel. L'Etat de droit, c'est l'Etat de tous, et non l'Etat de quelques-uns, des gouvernants crédibles qui jouissent de la confiance des gouvernés, l'alternance pacifique au pouvoir selon le seul désir du peuple souverain, et non l'obsession du pouvoir à vie", a-t-il martelé. Le régime en place a-t-il peur du renouveau politique ? La réponse de Benflis est toute simple : comme son nom l'indique, il s'agit de mettre du nouveau à la place de l'ancien, sortir du statu quo mortel pour mettre notre pays dans une dynamique revitalisante, donner des ambitions nouvelles au pays et ne plus se suffire de satisfaire les seules ambitions égoïstes de la minorité écrasante. RABAH KARECHE