Au lendemain du cinquième anniversaire de son indépendance, le Sud-Soudan n'est plus qu'un territoire où rebelles et forces gouvernementales s'adonnent à une guerre sans fin, dont les conséquences sont terribles pour une population livrée à elle-même. Hier, la population de Juba, la capitale du Sud-Soudan, s'est à nouveau réveillée sous le bruit des échanges de tirs nourris entre les forces gouvernementales et les rebelles. C'était le troisième jour de combats entre les deux parties, qui ont fait selon l'agence Reuters, qui cite une source proche du ministère de la Santé sud-soudanais, plus de 272 morts, dont 33 civils. Les combats ont gagné en intensité hier, s'étendant à plusieurs quartiers de la capitale, notamment près de l'aéroport international de Juba. La Mission de l'ONU au Soudan du Sud (Minuss) a fait état sur son compte Twitter de tirs de mortiers, de lance-grenades et d'"armes d'assaut lourdes". Un hélicoptère de combat a également été signalé au-dessus de Juba. Ces affrontements, qui ont commencé jeudi, sont les premiers depuis le retour en avril de Riek Machar à Juba, en vertu de l'accord conclu en août qui a mis fin à l'insurrection de ses partisans. Un porte-parole de Riek Machar, James Gatdet Dak, a rejeté la responsabilité de ces nouveaux combats sur les soldats gouvernementaux, en déclarant : "Nos forces ont été attaquées sur la base de Jebel." La même source a affirmé que l'assaut avait été repoussé, avant d'ajouter : "Nous espérons qu'il n'y aura pas d'escalade." Ceci étant, les hostilités se poursuivent dans plusieurs régions du pays. À la fin du mois de juin, un responsable d'une commission de surveillance du cessez-le-feu a qualifié le niveau des violences d'"épouvantable". Ces affrontements ont assombri le jour anniversaire, samedi, de l'indépendance conquise sur le Soudan après une longue guerre. À la différence des années précédentes, aucune célébration de l'indépendance n'a été organisée, officiellement pour manque de fonds. L'accord de paix de l'an dernier ne tient qu'à un fil et la population n'a jamais eu aussi faim. Cette reprise des hostilités vient compliquer la crise que vit le Sud-Soudan, notamment sur le plan humanitaire. On apprend que le nombre de personnes déracinées en interne et externe par cette violence a atteint, selon le Haut-Commissariat aux réfugiés des Nations unies, plus de 2,4 millions. Celles qui ont quitté le Sud-Soudan sont réparties sur les pays limitrophes. 231 307 sont réfugiées en Ethiopie, alors que 231 581 se trouvent au Soudan. L'Ouganda accueille pas moins de 206 523 Sud-Soudanais, alors que 49 823 ont trouvé refuge au Kenya, et 10 000 autres résident en République centrafricaine. C'est le sauve-qui-peut, dans un pays plongé dans une violence inouïe et dont les revenus sont tributaires à 98% du pétrole. Pour rappel, l'indépendance du pays a été gagnée sur le Soudan en juillet 2011 après une longue guerre. Mais la moitié de ses cinq années d'existence du pays a été marquée par le conflit interne alimenté par la rivalité entre Salva Kiir et Riek Machar. Face à cette situation catastrophique, l'International Crisis Group a récemment appelé les Etats garants de l'accord de paix à agir "de toute urgence" pour le sauver et "empêcher le pays de retomber dans un conflit à grande échelle". Merzak Tigrine