Des combats intenses ont repris dans la partie ouest de Juba, où les troupes des deux parties disposent de bases. Des milliers d'habitants de la capitale sud-soudanaise Juba fuyaient, hier, les combats intenses opposant les forces régulières et les ex-rebelles, les deux camps s'accusant mutuellement d'être responsables de ces nouvelles violences. Ces affrontements, qui ont fait au moins 150 morts depuis deux jours, mettent en péril un fragile accord de paix signé l'année dernière dans le plus jeune Etat du monde, qui fêtait samedi ses cinq ans d'indépendance. Le Soudan du Sud est déchiré depuis fin 2013 par un conflit féroce qui a fait plusieurs dizaines de milliers de morts et près de trois millions de déplacés. Dimanche, l'ONU a fait état de tirs de mortiers, de lance-grenades et d'»armes d'assaut lourdes» à Juba. La présence d'hélicoptères de combat et de chars a également été signalée. Ces informations ont conduit des milliers d'habitants de la capitale à se terrer chez eux ou à fuir leurs maisons, selon des témoins. «La situation s'est considérablement détériorée à Juba», a averti l'ambassade des Etats-Unis, invitant les Américains à rester chez eux. «De violents combats sont en cours entre forces gouvernementales et de l'opposition, aux environs notamment de l'aéroport, des sites de la Minuss (la mission de l'ONU), (dans le quartier de) Jebel et dans différentes zones de Juba», a-t-elle ajouté sur sa page Facebook. Aucun bilan des combats de dimanche n'était disponible. Les affrontements ont débuté jeudi à Juba par un accrochage, qui a fait cinq morts, entre des soldats loyaux au président Salva Kiir et des gardes du corps de l'ex-chef rebelle et actuel vice-président Riek Machar. Cet accrochage a été suivi de nouveaux combats vendredi où plus de 150 personnes - en majorité des soldats des deux parties - ont été tuées, selon les ex-rebelles. Dans le cadre d'un fragile accord de paix et de partage du pouvoir signé en août 2015, M. Machar est revenu, avec un fort contingent d'hommes armés, en avril à Juba, où il a été réinstallé vice-président et a formé avec M. Kiir un gouvernement d'union nationale. Hier, des combats intenses ont repris dans la partie ouest de Juba, où les troupes des deux parties disposent de bases au pied des montagnes de Jebel Kujur, et près d'un camp de l'ONU. Ils se sont ensuite étendus à d'autres zones de la capitale au fil de la journée, notamment dans le quartier de Gudele - réputé pour être une poudrière et où Riek Machar a installé son quartier général - et le quartier central de Tongping, près de l'aéroport international. La compagnie aérienne Kenya Airways a annoncé avoir suspendu dimanche tous ses vols à destination de Juba, évoquant une «situation sécuritaire incertaine». S'exprimant dimanche après-midi, le ministre sud-soudanais de l'Information, Michael Makuei, a accusé les ex-rebelles d'être responsables de ces affrontements. Il a également affirmé que le gouvernement «contrôlait totalement Juba», alors même que des échanges de tirs étaient toujours entendus dans la ville. Selon M. Makuei, Salva Kiir pourrait appeler à un cessez-le-feu plus tard dans la journée. «Son excellence le président devrait déclarer et imposer à ses troupes un cessez-le-feu unilatéral. Nous espérons que le premier vice-président, Riek Machar, fera de même», a ajouté M. Makuei. Plus tôt dimanche, un porte-parole de M. Machar avait de son côté rejeté la responsabilité des derniers affrontements sur les soldats gouvernementaux. «Nos forces ont été attaquées sur la base de Jebel», avait accusé James Gatdet Dak, affirmant que l'assaut avait été repoussé. Il a ajouté que des hélicoptères de combat et des tanks avaient été utilisés pour bombarder la base de M.Machar. Un camp de l'ONU, à proximité duquel les combats ont éclaté dimanche matin, abrite 28.000 déplacés. Hier, des habitants de la zone se sont réfugiés dans l'enceinte du camp. Selon des travailleurs humanitaires, des tirs ont aussi touché l'intérieur du camp, blessant plusieurs civils. Des civils se sont également dirigés, avec enfants et maigres possessions, vers une autre base de l'ONU proche de l'aéroport. Les violences ont terni samedi le cinquième anniversaire de l'indépendance du pays, enlisé dans la guerre civile depuis décembre 2013, un conflit politique compliqué par des hostilités entre ethnies et des luttes au niveau local. Malgré l'accord de paix de 2015, les hostilités se poursuivent dans plusieurs régions du pays.