Ce rite ancestral qui animait jadis tous les villages de Kabylie a planté son joli décor, l'espace d'un beau week-end, avec beaucoup d'émotion, de nostalgie marqué d'un gros sentiment de solidarité, de partage et de communion. Le village de Mehagga (commune d'Idjeur, daïra de Bouzeguène, à une soixantaine de kilomètres à l'est de Tizi Ouzou) a renoué, le week-end dernier, avec timechret, autrement dit lewziâa. Un rite festif égalitariste, aujourd'hui de plus en plus fréquent dans les villages de Kabylie. Ce rite ancestral qui animait jadis tous les villages de Kabylie a planté son joli décor, l'espace d'un beau week-end, avec beaucoup d'émotion, de nostalgie, marqué d'un gros sentiment de solidarité, de partage et de communion. Treize taurillons, dont certains ont été offerts par des citoyens généreux et d'autres achetés au moyen de cotisations villageoises auprès des éleveurs de la région, ont été sacrifiés, jeudi dernier, et l'opération de nettoyage et de distribution de viande s'est déroulée samedi, dans une atmosphère de fête, de gaieté et de convivialité. À l'occasion, pour donner son véritable sens à l'accomplissement de ce rite ancestral, tous les villageois, où qu'ils résident, ont été conviés à ce rendez-vous festif, à commencer par l'invitation de toutes les filles mariées à l'extérieur du village ainsi que les familles qui habitent loin. C'est ainsi que de nombreux invités originaires de la région sont venus de Kabylie, mais aussi d'autres régions d'Alger, de Bouira, d'Oran, voire même de France, pour prendre part à cette tradition qui était jadis très fréquente et permettait de regrouper tous les gens du village et surtout d'aider les familles démunies en partageant des moments agréables autour d'un même idéal basé sur l'entraide, le soutien, la compassion et surtout le pardon. Les taureaux immolés ont été découpés en 4 parts puis pesés, séchés et gardés dans des chambres froides. Sur la base d'une liste préalablement établie sur le nombre de foyers que compte le village, les taureaux ont été dépecés pour être ensuite répartis en parts égales et comprenant toutes les parties de chair de la bête et sans aucune pesée. Chaque famille a eu droit à sa quote-part qui devait servir à la préparation d'un bon dîner de circonstance (imensi) qui réunira tous les membres de la famille, dont certains ne se sont pas revus depuis des années, comme disait l'adage kabyle "Themlal Tasa D Way Thourew". Par ailleurs, les habitants de Mehagga, exploitant la journée du 20 août qui commémore le 60e anniversaire du Congrès de la Soummam, a inauguré un monument dédié à la mémoire de l'un des premiers chouhada du village et de la région des Ath Yedjar, le valeureux Sadli Lounis dit Bouzid, tombé au champ d'honneur le 11 octobre 1957, dans une embuscade opérée par les moudjahidine au lieudit Thigarwin, au contrebas du village. De nombreux édifices ont été également baptisés aux noms des chouhada, entre autres l'unité de soins, le stade mateco et l'inauguration du carré des martyrs du village qui compte 24 chouhada, dont un martyr inconnu. Enfin, ce rendez-vous mémorable s'est achevé par un déjeuner collectif auquel ont été conviés tous les invités ainsi que l'ensemble des villageois. KAMEL NATH OUKACI